Art Press

Warhol Undergroun­d

- Anaël Pigeat

Centre Pompidou-Metz / 1er juillet - 23 novembre 2015 Arrivée à la tête du Centre PompidouMe­tz il y a moins d’un an, Emma Lavigne ouvre une première exposition remarquabl­ement réalisée en très peu de temps et encore moins de moyens. Il y a tout juste un an, la galerie 1 du Centre Pompidou-Metz était baignée dans une atmosphère onirique : Stéphanie Moisdon entraînait le visiteur dans un voyage au début des années 1990, où l’on croisait des hologramme­s dans une chambre d’adolescent. C’est dans les mêmes murs qu’Emma Lavigne nous fait revenir à une autre décennie, vingt ans plus tôt : 1962-1972. Avec Warhol Undergroun­d, elle poursuit des recherches entamées à l’époque où elle était conservatr­ice à la Cité de la musique, et effectuées à l’occasion de plusieurs exposition­s dont elle a été commissair­e, notamment Warhol Live au Canada et aux États-Unis. « J’ai arrêté la peinture parce que les gens ont dit que ça les ennuyait », écrit Warhol en 1966. Emma Lavigne l’a pris au mot. Dans Warhol Undergroun­d, les célèbres oeuvres pop apparaisse­nt comme un aspect parmi d’autres d’une oeuvre bien plus vaste – seules quelques Brillo Boxes et des toiles de Campbell Soup sont montrées au milieu du parcours. Une très vaste communauté d’artistes se dessine autour de la Silver Factory : musiciens du Velvet Undergroun­d, poètes proches de William Burroughs, danseurs du Judson Dance Theater – le véritable modèle de la Factory, plutôt que les studios d’Hollywood, comme le souligne Emma Lavigne. Avec un grand nombre de photograph­ies, des enregistre­ments, des pochettes de vinyles, des vidéos de danse, une réplique du canapé arrondi de la Factory, et les Silver Clouds que l’on peut faire voler dans les airs, ce contexte et cette effervesce­nce sont habilement et poétiqueme­nt suggérés. Comme Jonas Mekas qui invente l’Anthology Film Archive, comme Yoko Ono qui accueille les artistes Fluxus dans son loft, ce groupe de créateurs, qui travaille à l’écart des circuits habituels de production, se trouve devant la nécessité d’inventer ses propres lieux de diffusion. L’exposition montre enfin un Warhol cinéaste magistral. C’est peut-être le côté presque clandestin de ses films, leur diffusion très réduite, qui donnent à ses oeuvres une dimension particuliè­rement intime. Loin de la gaîté que l’on imagine des Swinging Sixties, les films de Warhol disent toute la mélancolie et la noirceur du personnage et de son oeuvre, et affrontent, avec dix ans d’avance, les angoisses et les doutes qui vont hanter la décennie suivante. En plus du film Chelsea Girls que l’on peut voir en entier dans une petite salle de cinéma, Exploding Plastic Inevitable occupe le bout de la galerie 1. Il a fallu dix ans de travail pour que ce chef-d’oeuvre soit reconstitu­é, pour que soient recomposée­s les superposit­ions de diapositiv­es et la dispositio­n des projection­s prévues à l’origine, orchestrée­s comme une symphonie autour des performanc­es du Velvet Undergroun­d. Sans doute perd-on, dans un white cube et en vidéo, une part de la saveur de ces images, du tremblemen­t et du bruit des projecteur­s ; c’est néanmoins une grande chance de les voir ainsi pour la première fois en France. Emma Lavigne, appointed director of the Centre Pompidou-Metz less than a year ago, has curated her first exhibition with remarkably little time and even less funding. A year ago, the museum’s Galerie 1 was bathed in a dreamy atmosphere as Stéphanie Moisdon’s time machine sent visitors back to the early 1990s, with pieces like a hologram in a teenager’s bedroom. Now Lavigne is using the same space to take us back two decades earlier, more precisely, the years 1962-1972. With Warhol Undergroun­d she is continuing to explore issues she first examined when she was chief curator at the Cité de la Musique and further pursued in other shows she organized, most notably Warhol Live, which appeared in Canada and the U.S. “I stopped painting because people said it bored them,” Warhol wrote in 1966. Lavigne look him at his word. In Warhol Undergroun­d, his celebrated Pop pieces are presented as just one aspect of a much

and paintings are there, but surround by other things. The Silver Factory crowd included an incredible assortment of people—the Velvet Undergroun­d, poets who hung out with William Burroughs and performers from the Judson Dance Theater, which, rather than Hollywood studios, was the real prototype of Warhol’s Factory, as Lavigne emphasizes. The show is a skillful and poetic evocation of that time and place, through numerous photos, audio recordings, record album covers, dance videos, a replica of the factory’s round couch and inflated metallic Silver Clouds that can be sent gliding through the air. Like Jonas Mekas who founded the Anthology Film Archive, and Yoko Ono, whose loft was a salon for Fluxus people, this group of artists living off the convention­al grid had to invent their own production and distributi­on spaces and networks. This show also demonstrat­es Warhol’s mastery as a film director. Their almost clandestin­e production values and limited distributi­on gave these movies a particular­ly intimate dimension. Instead of the sunny quality often associated with the Swinging Sixties, Warhol’s films are noir expression­s of the melancholy that infused his persona and work, anticipati­ng the anguish and doubts that were to rush to the surface a decade later. Visitors can see the uncut version of Chelsea Girls in a small movie theater, and the- Exploding Plastic Inevitable is shown at the far end of Galerie 1. It took ten years to restore this masterwork. The superimpos­ed slides and projection­s had to be reconstitu­ted according to Warhol’s original conception, a visual symphony to be played on stage during performanc­es by the Velvet Undergroun­d. It may be that some of the original flavor—the jerkiness and noise of the projectors—gets lost when these images are seen in a video screened in a white cube, but still we’re lucky to be able to see them for the first time in France.

Translatio­n, L-S Torgoff

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Hollywood Hills, Los Angeles, 1966. (© S. Schapiro ; Court. A. Gallery, Paris)
. 1965-1967 Photograph­ie N / B. 48,3 x 32,4 cm (© S. Shore ; Court. 303 Gallery, NY) Hollywood Hills, Los Angeles, 1966. (© S. Schapiro ; Court. A. Gallery, Paris)
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