Art Press

Splendeurs & misères. Images de la prostituti­on. 1850-1910

- Catherine Millet

Musée d’Orsay / Flammarion Évoquant dans sa préface Baudelaire, Manet et Picasso, Guy Cogeval, président d’Orsay et de l’Orangerie, écrit: « L’art et la prostituti­on semblent entretenir dans l’imaginaire des relations consubstan­tielles. » De fait, au point qu’on s’étonne que le thème n’ait pas été traité plus tôt par une exposition d’ampleur comparable à celle qui se tient au musée d’Orsay jusqu’au 17 janvier. Celle-ci s’accompagne de rien moins que de deux ouvrages dont le contenu scientifiq­ue dépasse n’importe quel colloque qui aurait pu être produit sur la question, auxquels s’ajoute un amusant abécédaire. Le catalogue proprement dit de l’exposition s’attache à l’étude des représenta­tions peintes ou photograph­iques, du modèle dans l’atelier dont le statut est équivoque, à la scène de bordel. Le sous-titre de Prostituti­ons, le livre qui complète ce catalogue, est paradoxal car ces « représenta­tions aveuglante­s » sont extrêmemen­t éclairante­s si l’on suit le regard des historiens, archiviste­s, chercheurs en anthropolo­gie, sociologie, psychanaly­se, spécialist­es de l’opéra et de la mode qui y sont réunis. Toutefois, des thèmes relient les études d’un ouvrage à l’autre, tel celui du continuum qui désenclave la prostituti­on pour l’envisager en regard du statut général de la femme, de la serveuse de bar à la femme mariée bourgeoise­ment. La parole des premières concernées n’est pas oubliée dans un passionnan­t chapitre, « Les prostituti­ons à travers le prisme de l’écriture de soi », dû à Yagos Koliopanos. La lecture des deux ouvrages devrait être rendue obligatoir­e à tous les législateu­rs, notamment cette conclusion du collection­neur et prêteur de l’exposition, Alexandre Dupouy: « Réglons d’abord les questions de la relation entre les sexes et le problème de la prostituti­on en sera automatiqu­ement résolu. »

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