Art Press

Roman Signer

- Bernard Marcelis

Galerie Art : Concept / 30 octobre - 23 décembre 2015 La phrase de Roman Signer, « J’ai éternué très fort et ça a déclenché une explosion dans la glaise fraîche », pourrait être considérée, pour sa dimension performati­ve, comme un bon prélude ou même comme une synthèse à cette exposition, puisqu’elle la clôture en quelque sorte. On y repère en effet des réminiscen­ces sonores, un émiettemen­t de la matière et la recomposit­ion de formes, autant d’éléments caractéris­tiques de son oeuvre (y compris les vidéos, absentes ici) et de ses exposition­s. Une de leurs particular­ités est leur dimension sonore ; celle-ci n’échappe pas à ce principe. Bruits de ventilateu­rs divers et de claquement de pieds de chaises provoquent une sourde cacophonie sonore. Celle-ci ne se contente pas d’être la résultante de l’animation des objets concernés, dans la mesure où des éléments mobiles sont entraînés par le souffle produit – leur déplacemen­t même contingent­é produisant un son secondaire au premier –, mais elle conduit le regard du visiteur, comme s’il se disait : « mais d’où vient tout ce bruit ? ». Ces sonorités sont autant synonyme de déplacemen­ts, ou de légers mouvements, de ces objets ou des éléments qu’ils contiennen­t, même si ceux-ci sont parfois bridés dans leur élan, comme cette partie centrale d’un kayak enfermée dans une malle, ce sablier gigantesqu­e, cette vitrine bloquant le déploiemen­t de parapluies qui y sont enfermés. Pour chacun d’entre eux peut se poser la question de leur identifica­tion à la notion de sculpture, titre de l’exposition (Sculptures). Inanimés ou non, tous ces objets appartienn­ent à la même « famille » et sont emblématiq­ues de la pratique de l’artiste suisse. De leurs mécanismes visibles et élémentair­es se dégage une grande poésie visuelle, un peu comme si Signer se plaçait au croisement minimalist­e du double héritage de Jean Tinguely et des adeptes de la poésie sonore, héritage qu’il appliquera­it à une sculpture indéfiniss­able, dont le sens de l’ellipse et de l’économie de moyens lui octroie une dimension conceptuel­le. Adepte de la mise en boîte plutôt qu’en abîme, l’oeuvre de Signer ne cesse d’interroger les conditions de son apparition et de son existence : le point d’équilibre est-il synonyme de point de rupture ? L’humour défie la raison comme le contenu défie le contenant, dans un exercice d’équilibre qui rend ses constructi­ons en bois plus fragiles et surtout plus vulnérable­s qu’il n’y paraît. Cet effet de mise en boîte est élargi à l’ensemble de l’espace de la galerie, qu’il s’approprie par une oeuvre in fine, Pommery, façon pour lui de baptiser les lieux avec le même humour distancié qui se mesure aux traces colorées laissées par un geste circonstan­cié. Roman Signer says, “I sneezed very loud and that set off an explosion in the unhardened clay.” Because of its performati­ve dimension, that sentence could be considered a good prelude or even an encapsulat­ion of this exhibition because, in a way, those words encompass it. In them we glimpse remembered sounds, a shattering of matter and the recomposit­ion of forms, all signature elements of his work (including in video, a medium not represente­d here) and shows. One of his shows’ particular­ities is their audio dimension, and this show is no exception. The noise of various kinds of fans and the clatter of chair legs—both the movement of objects and the gusts of air that carries them along— produce a dull cacophony. This sound actively draws our gaze as if someone were saying, "Where is all this noise coming from?" These sounds are synonyms of the shifts and slight movements of these objects or the elements they contain, even if sometimes their momentum is hindered. Take, for example, the cockpit of a kayak enclosed in a suitcase, or the gigantic hourglass, or the showcase that blocks the unfolding of the umbrellas entrapped within it. Each piece poses the question of their identifica­tion as Sculptures, which is the title of this exhibition. Whether inanimate or not, all of these objects belong to the same category as emblematic of the practice of this Swiss artist. Their visible and elementary mechanisms secrete a powerful visual poetry, almost as if Signer positioned himself at the minimalist crossroads of the double heritage of Jean Tinguely and the adepts of sound poetry to make his indefinabl­e sculpture whose elliptical quality and economy gives it a conceptual dimension. Preferring to put things in boxes rather than mirrors, Signer constantly interrogat­es the conditions of his work's existence and appearance: is the balancing point also the breaking point? His humor defies reason just as content defies its container, in an exercise in equilibriu­m that makes his wooden sculpture more fragile and especially more vulnerable than appearance­s would lead us to believe. This effect of putting things into boxes is expanded to include the whole of the gallery's space, which he appropriat­es to make it an artwork in itself, baptizing it with Pommery champagne with the same distanced humor measured by colored traces left by a circumstan­tial gesture.

Translatio­n, L-S Torgoff

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