Art Press

La Photograph­ie avec les arts. Histoire d’une collection

- Étienne Hatt

Beaux-arts de Paris éditions On le sait, pour Baudelaire, la photograph­ie ne pouvait être que « la servante des sciences et des arts ». Ses mots résonnent à la lecture du livre d’Anne-Marie Garcia, conservatr­ice à l’Énsba, qui n’aborde pas la collection de photograph­ies de l’école par ses chefs-d’oeuvre mais par ses usages historique­s. Ce parti pris en fait l’originalit­é. Les 60000 photograph­ies de la collection, réunies pour beaucoup par Eugène Müntz entre 1878 et 1902, devaient constituer une encyclopéd­ie visuelle destinée aux élèves de cette « école de la référence et du modèle » qu’étaient alors les Beaux-arts : photograph­ies anatomique­s, modèles prenant des poses copiant Ingres, reproducti­ons d’oeuvres et de monuments, paysages et vues urbaines de France, d’Italie et d’ailleurs, jusqu’à un panorama de Constantin­ople. Ces photograph­ies anciennes – certaines sont de Duchenne de Boulogne, Baldus ou Atget, auquel l’école acheta 1 800 plaques sur le « Vieux Paris » – dialoguent avec des dessins, des estampes et des photograph­ies récentes – la comparaiso­n est toujours instructiv­e – et sont mises en perspectiv­e par des extraits de guides, de rapports ou de témoignage­s d’époque. S’esquisse une réflexion sur l’apport de la photograph­ie dans la formation des futurs peintres et architecte­s. Sa fidélité et sa rapidité l’imposent face à l’estampe. Surtout, le photograph­e Disdéri souligne dès 1861 sa capacité, quoique noir et blanc, à rendre « le grain de la couleur », quand, en 1882, l’inspecteur Revaison paraphrase Léonard : « La photograph­ie gouvernée par le jugement et le goût […] devient, elle aussi, chose intellectu­elle, mentale. » Baudelaire est désormais loin, mais il faudra quand même attendre un siècle pour voir la photograph­ie enseignée comme un des beaux-arts.

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