Ruwen Ogien
Mon dîner chez les cannibales
Grasset « Je ne crois pas que la vocation de la philosophie soit d’engendrer des prophètes de malheur », annonce Ruwen Ogien en ouverture de la cinquantaine de ses chroniques réunies ici. L’ensemble de ces réflexions, au croisement des sciences humaines et sociales, à travers jugements politiques et questions morales, porte sur des thèmes qui passionnent le débat public : mariage gay, amour et sexualité, fin de vie, filiation et procréation, mais aussi religion, liberté, démocratie, laïcité, consommation de cannabis ou encore vote des étrangers. Proposant ainsi une analyse des questions de société, dans une approche concrète et directe, Ogien défend la possibilité d’accroître la liberté de création et d’expression, en accordant toujours plus de droits individuels et collectifs. Ce recueil de textes de circonstance forme un « journal philosophique » qui ne suit ni ordre chronologique ni classement thématique, mais fournit un passionnant antidote au catastrophisme qui frappe régulièrement nos esprits. Dans « La solitude des migrants », définissant le droit fondamental d’émigrer, il revient sur le sens de l’hospitalité et de la solidarité, et rappelle le sauvetage des Vietnamiens et Cambodgiens, à la fin des années 1970 en Europe ; s’interrogeant autant sur « le pouvoir érotique de la démocratie » que sur l’éthique du care, le philosophe conclut sur un « dîner chez les cannibales » : dialoguant avec le Montaigne des « Cannibales », Ogien convoque à un dîner imaginaire des hôtes de bonne compagnie pour s’interroger sur les pratiques répugnantes comme l’inceste ou le cannibalisme. À la fin du dîner, les convives décideront de ce qui est moral ou immoral, et selon quels critères. Passionnant débat qui rouvre le sens de la discussion au coeur de notre société contemporaine.