Claudia Roth Pierpont
Gallimard Le premier intérêt de cet essai brillant sur Philip Roth et son oeuvre est que, d’une certaine façon, Roth y participa. En effet, l’auteur de Roth délivré, Claudia Roth Pierpont, journaliste au New Yorker, est devenue, avec les années, une amie de l’écrivain – avec lequel elle n’a aucun lien de parenté. Roth délivré se présente comme un examen des transformations de Roth écrivain, un examen précis, détaillé et méthodique sur l’évolution de ses thèmes et de son style ; depuis ses premières nouvelles – et l’indignation qu’elles suscitèrent –, jusqu’à son explosion littéraire ; depuis l’accomplissement de l’Écrivain fantôme ( The Ghost Writer, 1979) jusqu’à la série des chefsd’oeuvre des années 1990 et 2000. Ce qui est tout à fait captivant, c’est que Claudia Roth Pierpont ne se cantonne pas aux livres du grand écrivain américain. Dans Zuckerman délivré, ce dernier fait une distinction entre l’univers « non-écrit » et celui qui émerge de la machine à écrire « par opposition à la réalité et à la fiction ». Il explique que le poids entre les deux est assez équitablement réparti. Et l’essayiste, précisément, si elle fait la part belle aux romans, s’intéresse encore à « la vie qui a si souvent servi l’oeuvre ». Et c’est là que Roth intervient – Claudia Roth Pierpont a beaucoup discuté avec lui, il s’est beaucoup confié. La biographie est plus ou moins importante selon les périodes, mais l’éclairage qu’elle apporte demeure considérable. En 1981, Roth déclarait au Nouvel Observateur : « L’art, c’est la vie aussi, vous savez. La solitude c’est la vie, la méditation c’est la vie, la supposition c’est la vie, la contemplation c’est la vie, le langage c’est la vie. » C’est donc clair : Roth délivré est un ouvrage sur la vie de l’art de Philip Roth en même temps qu’il est un essai sur l’art de sa vie.