Cyril Aboucaya
Au croisement de l’art minimal, du design et des pierres tombales, les oeuvres de Cyril Aboucaya interrogent les mutations de nos pratiques cultuelles et le devenir marchand des avant-gardes historiques.
Pompes funèbres, concept store, installations d’art minimal ? Difficile à dire au premier regard, tant les sculptures géométriques de l’artiste empruntent au vocabulaire des objets mobiliers et mémoriels, tandis que leurs mises en espace simulent les dispositifs propres à ceux du commerce. Il s’agit là d’une ambiguïté que cultive l’artiste depuis ses débuts, avec des sculptures épurées en forme d’étagères, d’autels ou de pierres tombales, installées les unes à côté des autres comme le seraient des produits dans une boutique. Réalisées en aggloméré laissé brut, peintes dans des couleurs pop ou recouvertes d’adhésifs texturés faux marbre ou faux bois, elles évoquent immanquablement des meubles en kit façon Ikea en même temps que des sculptures abstraites. Ainsi par exemple de Concept Store (2011), où deux pierres tombales jouxtent des piédestaux surmontés de vrais ananas et de sombreros, un manuel de montage desdites tombes et deux étagères présentant un petit retable et des noix de coco. Des chapeaux et des fruits exotiques que l’on retrouve dans plusieurs oeuvres de l’artiste ( Clara, 2010; Loisirs & Habitat, 2012), qui font quant à eux penser à des offrandes votives telles qu’elles existent dans certaines cultures d’Amérique latine ou d’Asie. Se condensent ici divers vocabulaires et pratiques : les formes géométriques et épurées du minimalisme américain rencontrent celles des monuments aux morts et de l’industrie du meuble bon marché ; l’univers de la dévotion et du rituel funéraire croise celui de la consommation ; l’idée de pérennité et de durabilité entre en collision avec l’éphémère et l’obsolescence programmée,