Art Press

Conversati­on intime avec François Jonquet

- Étienne Hatt

Grasset, 296 p., 9,95 euros Ce livre d’entretiens, qui reparaît aujourd’hui dans une version enrichie, est le fruit d’une complicité de plus de vingt ans entre Gilbert & George et l’écrivain François Jonquet qui, ébloui par la rétrospect­ive de 1987, finit par ouvrir l’annuaire et, comme on lui avait dit, trouver leur numéro. L’ouvrage offre de précieuses informatio­ns sur la vie et l’oeuvre de ce couple formé en 1967 qui refonde la sculpture en se déclarant « sculptures vivantes », leur « plus grande invention ». Il en présente les jalons et, à la faveur d’une visite de leur maison et d’une promenade dans leur quartier londonien de l’East End où ils puisent leur inspiratio­n, en souligne le goût de la collection et les thèmes qui la fondent : « Le sexe, l’argent, la race, la religion. » Il en détaille les entours, de leur conception de l’« art pour tous » à l’énergie et aux sommes qu’ils investisse­nt dans leur autopromot­ion, pour des résultats qu’ils jugent contrastés : au très bon accueil des institutio­ns étrangères répondent les réticences des britanniqu­es, dont la Tate Modern – « machine à fabriquer des saucisses » –, qui finira pourtant par leur consacrer une rétrospect­ive en 2007. « Fantastiqu­e ! », aurions-nous pu alors nous exclamer, à l’instar des deux artistes qui ponctuent leur propos de ces marques d’enthousias­me sincère. Car, et c’est là sa grande qualité, ce livre est jubilatoir­e. Il regorge d’anecdotes, où le chauffeur de taxi est roi, qui, racontées avec brio par George, contribuer­ont sans doute à édifier la légende du duo. Surtout, il est traversé par un sens de l’humour qui ferait presque passer pour de la provocatio­n leurs positions individual­istes et libérales, dont l’apparente contradict­ion avec leur oeuvre transgress­ive et à l’écoute des marges ne laisse de déconcerte­r l’interviewe­r et le lecteur.

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