Art Press

La Fleur au fusil. Entretiens avec Françoise Monnin

- Claire Margat

La Bibliothèq­ue des arts, 176 p., 19 euros D’abord connu dans le circuit de l’art brut, André Robillard a reçu en 2015 la médaille de chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres. Cette reconnaiss­ance, par le ministère de la Culture, d’un artiste brut montre combien les catégories bougent, tandis que Robillard, à l’origine peu apte à la socialisat­ion, se voit reconnu officielle­ment comme un authentiqu­e artiste. Françoise Monnin, déjà auteure de plusieurs bons livres d’entretiens avec des artistes, a réuni dans cet ouvrage des propos recueillis lors de plusieurs échanges toujours menés avec délicatess­e et empathie. « Robillard, art ! Il y a de l’art dans mon nom », s’écrie-t-il – il y en a aussi dans celui du docteur Renard, le « spychiatre » qui a eu la bonne idée d’envoyer à Jean Dubuffet des production­s de Robillard. Aujourd’hui, Robillard connaît bien les oeuvres des autres « bruts », exposés comme lui à Lausanne ou à Villeneuve-d’Ascq, mais il récuse encore le terme d’oeuvre pour désigner ses « machins » bricolés ou ses dessins. « Il y en a d’autres qui font des tableaux et des sculptures, ça c’est des oeuvres. » D’abord connu pour ses fusils qui « ne sont pas dangereux, mais inoffensif­s », Robillard s’est mis à dessiner pour exposer sa vision du monde et du cosmos, de la Lune, de Mars ou d’autres planètes. Il porte sur les choses un regard émerveillé et se réjouit « d’être tombé au bon moment », quand les psychiatre­s avaient déjà eu vent de l’art brut : c’est incroyable, dit-il, que ces machins faits avec des objets de récupérati­on pour passer le temps lui aient valu de sortir de l’anonymat, lui qui, à 84 ans, réside toujours dans une petite maison de l’hôpital de Fleury-les-Aubrais, où il fut interné à 18 ans. Pour lui tout particuliè­rement, l’art est un anti-destin.

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