Sex and the Series
Soap, 240 p., 18,90 euros Les séries des années 2000, donnant à voir des pratiques jusque-là invisibles, ont bouleversé la représentation de la sexualité féminine. Elles ont ainsi déplacé les mentalités et peut-être même modifié les expériences. Cette conviction a quelque chose de naïf : on ne sache pas que, des écrans aux chambres, le chemin ait jamais été direct, ni qu’étudier isolément la mise en scène du sexe soit le plus recommandé – mieux vaudrait l’inscrire dans un cadre esthétique général. Tant pis. Sans doute une telle candeur était-elle nécessaire pour donner son élan au premier livre d’Iris Brey, encore que l’expression « révolution télévisuelle », qui figure en sous-titre, ménage une ambiguïté : révolution par la télé ? ou juste à la télé ? Cette conviction permet en tout cas à l’auteure, docteure en cinéma armée en sus d’une double culture franco-américaine, de ne parler que de sexe, et nûment, sans jamais adresser la moindre oeillade à son lecteur. Il y a là aujourd’hui comme un exploit. Cette rigueur dans le discours équilibre si bien l’ingénuité du parti pris que l’une a dû être la condition de l’autre. Le livre aborde une large gamme de sujets, du cunnilingus au viol, puisant aussi bien dans Seinfeld que dans Game of Thrones des exemples toujours précis, et dûment placés sous éclairage « scientifique ». Brey distingue entre les audaces des networks, du câble et des chaînes de Streaming. Elle montre les progrès qui ont eu lieu – concernant la masturbation, l’emploi du mot « clitoris » – et salue une nouvelle génération de showrunneuses. Elle décrit les interdits qui résistent, touchant la femme enceinte ou l’inceste père-fille. Elle a un cap et le tient. Combien sont les livres qui convainquent non pas en débordant, mais en serrant leur thème?