WILL BENEDICT
La circulation et le nivellement des images préoccupent Will Benedict. L’utilisation de la vidéo comme de la peinture dans ses dernières expositions révèle le sens de sa démarche: reconstruire les cloisonnements entre les genres.
« La conquête de la rétine par un paradis artificiel » : les mots sont ceux du théoricien des médias Friedrich Kittler décrivant l’avènement du règne du petit écran. Conquérante, voire cannibale, la télévision l’est parce qu’elle ne supporte pas la coexistence avec les autres médias optiques : englobante, synthétique au sens hégélien du terme, elle officie en qualité de « système d’information désormais fermé (1) ». Le constat clôt l’imposante entreprise de totalisation de l’histoire visuelle du monde menée par l’auteur dans ses Cours berlinois, de la préhistoire jusqu’à la décennie 1990, qui est celle depuis laquelle il s’adresse à son auditoire. Avec la télévision, un nouveau règne s’ouvre, incommensurable avec le film et la photographie, que les prémices de l’informatique, qu’il sera l’un des premiers à théoriser, ne feront qu’augmenter en degrés sans toutefois en contredire la nature. Au lecteur contemporain, son engouement peut sembler gentiment désuet ; et a fortiori à l’amateur d’un art également qualifié de contemporain. Il est hautement improbable en effet que celui-ci ait pu ignorer les échos de la 9e Biennale de Berlin, confiée au collectif post-digital DIS Magazine. Or cette entreprise, quelle que soit l’opinion que l’on s’en fasse, semblait définitivement reléguer l’ère télévisuelle aux manuels d’histoire des médias, et la remplacer par une esthétique du web 2.0 packshotée et post-digitale. C’est précisément à Berlin, au quatrième et dernier étage de l’Akademie der Künste, l’un des cinq sites de la Biennale, qu’était présentée