Éric Suchère
Motifs et Partis pris FRAC Auvergne/Galerie Jean Fournier, 357 p., 24 euros
Recueil de textes monographiques écrits depuis une quinzaine d’années, Motifs et Partis pris réunit des artistes historiques – Shirley Jaffe ou Gilles Aillaud –, d’autres largement reconnus – Philippe Cognée, Valérie Favre ou Gilgian Gelzer – et des choix plus singuliers, indépendants des modes ou du marché. Une rigueur et un engagement pour la peinture s’y manifestent. Une lecture très intéressante de ses enjeux actuels s’y dessine à la faveur de la diversité des oeuvres abordées et de la mise à l’épreuve du regard que requiert l’écriture. Éric Suchère réévalue la part du sensible dans une oeuvre a priori littérale (Michel Parmentier), met en exergue le fonctionnement d’une mémoire des formes et de l’hétérogénéité au sein du tableau (Claude Tétot, Alain Sicard) ou encore la tension entre le motif et l’a priori formel (Damien Cabanes). De même, l’article sur Denis Laget développe une distinction entre figuration et représentation qui, issue de Roland Barthes, est extrêmement utile dans un moment où la relation de la peinture à l’image est très prégnante. On ne peut pourtant réduire l’ouvrage à un recueil sur la peinture. On oublierait une partie non négligeable d’artistes – Florence Chevallier ou Fabrice Lauterjung. Surtout, l’approche d’Éric Suchère ne repose pas sur une telle division. Alors, s’il faut choisir un mot, ce serait peut être celui d’« élégantes » qui caractériserait le mieux ces oeuvres, c’est-à-dire, en référence à Georges Bataille, des oeuvres qui confrontent le regard à leur intrigante présence muette. L’auteur, qui est aussi poète, n’écrit pas seulement « sur » mais « avec » les oeuvres. Chaque texte est la recherche d’une langue qui s’approche au plus près de chaque création. En ce sens, la critique d’Éric Suchère fait oeuvre.