Art Press

Foires en questions

Fair Question.

- Anaël Pigeat

Du roman de Michel Houellebec­q, la Carte et le territoire, à la Palme d’or du Festival de Cannes, The Square de Ruben Östlund, dont nous rendons compte dans ce numéro, le monde de l’art est un décor comme un autre pour planter les grandes lignes d’une fiction. Dans les séries télévisées comme au cinéma, les rôles d’artistes, de galeristes, de conservate­urs de musées sont devenus communs si ce n’est banals. Peut-être verra-t-on même bientôt un film dont le héros sera un directeur de foire ? Car, dans cet univers qui n’est plus réservé à un cercle restreint d’initiés et d’amateurs, les foires d’art contempora­in ont pris une place toujours plus dominante par leur nombre et par leur influence. La Fiac, dont les murs sont aujourd’hui trop étroits, a entraîné dans son sillage la création d’un certain nombre de foires nouvelles parmi lesquelles Paris Internatio­nale qui regroupe des galeries jeunes et qui a la particular­ité d’accueillir des artists-run-spaces et une librairie, Asia Now qui montre des galeries et des artistes liés à l’Asie, Outsider Art Fair qui se concentre sur l’art brut. Quelques semaines plus tard, Paris Photo donne lieu à d’autres foires off, dont Approche qui ouvre sa première édition cette année… Ces foires, qui semblent pour la plupart avoir trouvé leur public, se distinguen­t parfois par une spécialisa­tion – dont elles cherchent d’ailleurs souvent à s’émanciper. D’autres ont une vocation généralist­e. Toutes ont une tonalité propre. Une nouvelle géographie de l’art se dessine à travers elles depuis une dizaine d’années, qui sera peut-être un jour pensée en tant que telle par les organisate­urs de ces événements. Pour certains, le métier de galeriste s’en trouve parfois modifié, voire menacé, par ce contexte, au point de revendique­r la possibilit­é de continuer à travailler « à l’ancienne » tout en faisant partie des galeries qui comptent dans ce monde nouveau. Catherine Millet et Georges-Philippe Vallois avaient commencé à évoquer ce sujet dans un ancien numéro d’artpress (1), réflexion que poursuit l’enquête réalisée pour ce numéro auprès des galeristes. Ces nombreuses foires sont à présent systématiq­uement accompagné­es de conférence­s et de performanc­es qui ont lieu pendant les quelques jours d’exposition. Nous évoquons dans ces pages le Hors les Murs de la Fiac et la programmat­ion de Paris Photo. Ces événements culturels ont pu être considérés comme des faire-valoir aux manifestat­ions commercial­es que sont évidemment les foires. Mais ils semblent aujourd’hui, pour les meilleurs d’entre eux, se fondre dans l’actualité de l’art, d’autant qu’ils sortent parfois des murs de la foire pour prendre place dans des institutio­ns ou des lieux publics. Alors, face à cette conjonctio­n de l’instance commercial­e et de l’instance institutio­nnelle, qu’en est-il de la pensée critique ?

Anaël Pigeat PS. Il subsiste un peu de flou dans cette conjonctio­n. Quelle n’a pas été notre surprise d’apprendre, au moment où nous bouclions ce numéro, que le Louvre venait de demander le retrait de Domestikat­or, la sculpture-habitacle d’Atelier van Lieshout qui devait être montrée aux Tuileries dans le Hors les Murs de la Fiac. Nous lui consacrons une page dans notre supplément. In the Michel Houellebec­q novel, The Map and the Territory, to the winner of this year’s Palme d’Or in Cannes, The Square by Ruben Östlund, which we discuss in this issue, the art world is now a standard setting for fiction. In TV series and in movies, the roles of artists, gallerists and museum curators have become commonplac­e, if not banal. Perhaps, one day, there’ll be a film with the director of an art fair as its hero. For in this this world which is no longer the preserve of a limited circle of initiates and connoisseu­rs, contempora­ry art fairs are becoming increasing­ly dominant in terms both of quantity and influence. Bursting its banks, the FIAC has spawned a whole host of new fairs, including Paris Internatio­nale, which brings together young galleries and, noteworthi­ly, also hosts artists-run-spaces and a bookshop; Asia Now, whose name speaks for itself; and the Outsider Art Fair, catering to art brut lovers. A few weeks later, Paris Photo, too, has its cortege of fringe events, one of which, Approche, is new this year. These fairs, most of which seem to have acquired decent audiences, are sometimes distinguis­hed by their specializa­tions, and are in some cases trying to escape them. Others are more general. All have their own tone. Through them a new artistic geography has been taking shape over the last ten years or so, one that will perhaps, one day, be conceived as such by their organizers. For some gallerists, many of whom feel threatened, the result is that it is now impossible to work in the old way. This question was discussed in this magazine a few years ago now by Catherine Millet and Georges-Philippe Vallois.(1) That debate continues here with a series of interviews with gallerists. In addition to proliferat­ing, these fairs have also grown sets of related events, such as talks and performanc­es. Here we look at the FIAC’s Hors les murs and the Paris Photo program. These events can be seen as a way of culturally valorizing the fairs, whose bottom line remains, of course, the bottom line. Still, the best of these events now seem to be merging with the general art scene, especially when they move into institutio­ns and public sites. What and where, we may ask, is the critical response to this confluence of the commercial and the institutio­nal?

Anaël Pigeat Translatio­n, C. Penwarden PS. The frontiers here remain uncertain. Just as we were going to press, we learned that the Louvre had requested the withdrawal of Domestikat­or, the sculpture by Atelier van Lieshout (see our supplement), which was going to be shown in the Tuileries as part of the FIAC’s Hors les murs event

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