Laure Martin (dir.)
Anne et Patrick Poirier Flammarion / MEP, 264 p., 49 euros
Accompagnant leur récente exposition à la Maison européenne de la photographie, ce livre est en réalité l’ouvrage le plus complet paru à ce jour sur l’ensemble du travail d’Anne et Patrick Poirier. Le parcourir, c’est comprendre à quel point le temps est nécessaire pour appréhender un travail lorsqu’il ne répond pas aux canons d’une époque. L’aventure artistique des Poirier a commencé en Italie où ils séjournent cinq ans avant de poursuivre leurs collectes de fragments du passé au cours de multiples voyages d’exploration durant lesquels ils s’imprègnent de la mémoire des lieux. Travaillant en couple, loin des capitales de la modernité radieuse, ils échappent aux influences, à l’air du temps, examinant inlassablement, dans un langage riche en évocations poétiques et métaphores, les mêmes questions – celles « de la destinée humaine, de la relativité des cultures et de la mort des civilisations », comme l’écrit Jean-Hubert Martin en introduction. Or, ces questions surgissent aujourd’hui au coeur de la réflexion des nouvelles générations qui s’interrogent sur un avenir de plus en plus préoccupant. Ainsi, certaines de leurs installations évoquent-elles les destructions d’Alep et autres cités antiques du Moyen-Orient, tandis que d’autres ( Exotica, 2000) semblent à l’image des métropoles modernes devenues invivables. Fruit de la collaboration étroite entre les artistes et Laure Martin, cette monographie incluant des textes brefs (signés notamment Lóránd Hegyi et Robert Storr) vaut surtout pour son abondante iconographie. Un chapitre traite de la pratique originale de la photographie par les Poirier, sujet rarement abordé à leur propos, en dépit de l’intérêt de leurs réalisations dans ce domaine, comme le prouvait leur exposition.
Catherine Francblin