Grasse, sèche, sifflante… Ce réflexe salutaire peut être inquiétant : on l’écoute et on réagit
PLUTÔT SÈCHE, GRASSE, SIFFLANTE, NOCTURNE OU EN QUINTES ? L’ÉCOUTER PERMET DE MIEUX LA CONNAÎTRE, ET DONC DE MIEUX LA SOULAGER.
Indispensable pour expulser les particules irritantes, les virus et même les polluants, la toux est un réflexe qui protège nos voies respiratoires. Un toussotement de temps en temps ? Rien de plus normal. Mais lorsque les quintes s’installent, gênent la respiration ou gâchent nos nuits, c’est le signe que quelque chose cloche. Le Dr Jean-Philippe Santoni, pneumologue auprès de la fondation du Souffle*, nous aide à décrypter la signification de notre toux pour bien réagir.
Sèche, puis grasse ? Alerte au virus
Ça commence avec la gorge qui grattouille, ça se poursuit avec le nez qui coule, un gros coup de barre, puis, peu à peu, les quintes apparaissent. Rhino-pharyngite, laryngite, pharyngite, bronchite… Quasiment tous les virus de l’hiver s’accompagnent d’une toux, même si celle-ci est un peu différente d’un cas à l’autre (voir encadré ci-contre). Elle devient généralement de plus en plus grasse au fil des jours, pas à cause d’une surinfection, mais seulement pour
* lesouffle.org permettre à notre organisme d’expulser les débris des cellules infectées. Un processus qui peut prendre une, deux, voire trois semaines, car une infection peut endommager une partie des cellules qui tapissent les voies respiratoires. Le temps que celles-ci soient de nouveau opérationnelles, la toux nous protège des nuisibles qui tentent de s’infiltrer dans notre corps. Pratique !
ON AGIT : bloquer la toux revient à laisser les virus stagner dans la gorge ou les poumons et augmente le risque de surinfection. On oublie donc les sirops antitussifs, qui sont en plus bardés d’effets secondaires (somnolence, troubles digestifs, accoutumance). Pour soulager les voies respiratoires, mieux vaut miser sur des inhalations qui permettent de réhydrater les muqueuses (2 fois par jour). En cas de toux sèche, on complète avec des substances qui adoucissent la gorge, comme le miel aux propriétés cicatrisantes et antibactériennes. À choisir de préférence d’origine française ou européenne pour un produit de qualité, et à mélanger à une boisson chaude. Côté plantes, la racine
de guimauve, riche en mucilages, détend les tissus de la gorge et combat l’inflammation sans effets secondaires
(1 cuil. à s. dans une tasse, laisser infuser 10 min). En cas de toux grasse, on peut recourir à des expectorants ou des fluidifiants pour modifier la structure du mucus et faciliter son évacuation, même si ces produits ne réduisent pas la durée du rhume, ni ses symptômes. On opte aussi pour un baume à appliquer sur le thorax (en pharmacie, type Vicks VapoRub, ou maison : 3 gouttes d’huile essentielle d’eucalyptus globulus diluées dans 1 cuil. à c. d’huile végétale. Ne pas appliquer chez l’enfant et la femme enceinte). Et on boit au moins 2 l par jour, de boissons chaudes ou froides.
C’est surtout la nuit ? On pense pollution intérieure et digestion difficile !
Nos logements sont plus chargés en particules polluantes que l’air extérieur, même en cas de pic de pollution. La faute au chauffage, au tabac, aux mobiliers et peintures, aux produits d’entretien… On peut alors se retrouver avec le nez bouché, des maux de tête et/ou une toux sèche, qui apparaissent quand on reste longtemps à l’intérieur (la nuit, par exemple). Si les quintes perturbent notre sommeil, il faut aussi penser à un éventuel reflux gastro-oesophagien. L’acide gastrique censé rester à l’intérieur de l’estomac remonte dans l’oesophage quand on se couche. Résultat : on tousse sec avec, parfois, des sensations de brûlures dans la poitrine, des régurgitations acides ou une voix rauque au réveil.
ON AGIT : on réduit la pollution intérieure en bannissant tabac, bougies, encens, sprays d’huiles essentielles et produits d’entretien chimiques. On remplace ces derniers par du savon noir, du bicarbonate de soude et du vinaigre blanc, et on aère deux fois 20 minutes par jour, de préférence tôt le matin et tard le soir. On pense aussi à bien ouvrir la fenêtre de la cuisine pendant qu’on fait la popote. Si on soupçonne un reflux, un ORL peut le diagnostiquer. Il faut alors revoir son hygiène de vie : dormir en position demi-assise, éviter la viande rouge, les plats pimentés, la tomate, le chocolat, le café, le thé et l’alcool, ainsi que les anti-inflammatoires, hyperagressifs pour les parois de l’estomac. Si ça ne suffit pas, il existe des traitements médicamenteux qui limitent l’acidité et font disparaître la toux.
Toux du fumeur ? On consulte
Des quintes grasses tout au long de la journée, mais surtout au réveil avec des crachats et l’impression de devoir se « décrasser » ? Logique, quand on fume. Le tabac provoque une inflammation des bronches et des poumons, et le corps se défend en toussant pour chasser les toxiques. Néanmoins, il faut consulter car l’inflammation chronique peut mener à la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Cette maladie du tabac qui toucherait au moins 3,5 millions de personnes en France passe souvent inaperçue (on pense que c’est juste la clope) et entraîne, à long terme, un rétrécissement des bronches et une diminution de la capacité respiratoire, avec un essoufflement progressif. Voire un cancer du poumon. ON AGIT : en prenant rendez-vous chez un pneumologue afin de faire un bilan respiratoire complet. Bien entendu, pour arrêter de tousser ou retrouver du souffle, il faudra arrêter de fumer. Mais ça vaut le coup car plus on prend la BPCO tôt et plus on peut limiter les difficultés respiratoires grâce à des médocs et une réhabilitation adaptée.
Ça siffle ? Et si c’était de l’asthme ?
Si l’asthme survient généralement dès l’enfance, il peut aussi apparaître soudainement à l’âge adulte et provoquer des sifflements, une toux persistante ou saisonnière, une gêne respiratoire. Seul un médecin pourra, grâce à des examens du souffle, poser le diagnostic.
ON AGIT : inutile d’avoir recours aux sirops antibiotiques à répétition, qui n’arrangent rien et risquent de créer des résistances. On oublie aussi les huiles essentielles, qui peuvent être très allergisantes. En revanche, on se met au sport. Celui-ci n’est absolument pas interdit aux asthmatiques, il est au contraire bénéfique et permet d’entraîner les muscles respiratoires. Il faut cependant prendre quelques précautions : ne pas pratiquer quand il fait froid et sec, avoir ses médicaments avec soi, bien s’échauffer…