Apprendre à décrypter l’information en bibliothèque

En partenariat avec l’éducation nationale, les bibliothèques sont actrices de l’éducation aux médias et à l’information (EMI) pour répondre à un enjeu crucial : permettre aux publics, notamment aux jeunes, de former leur esprit critique afin de se forger une opinion sur les informations qu’ils reçoivent et d’exercer ainsi leur rôle de citoyen de manière éclairée.

De nouveaux moyens

En France, depuis les attentats de 2015 et la multiplication des fake news, notamment lors de l’élection présidentielle américaine, les ministères de la Culture et de l’éducation nationale se sont unis pour donner aux citoyens les outils indispensables au décryptage des images et des textes qui arrivent, plusieurs fois par jour, sur leurs écrans. Cela concerne particulièrement les jeunes : 71 % des 15-34 ans déclarent s’informer sur leur téléphone portable, via les réseaux sociaux (Enquête Médiamétrie de 2018 pour le ministère de la Culture) mais leur capacité à rechercher et évaluer l’information reste à développer.

En 2018, le ministère de la Culture a déployé trois millions d’euros pour l’éducation aux médias et à l’information. Plusieurs partenaires bénéficient de ce soutien : les associations de professionnels de l’information, celles en charge de l’éducation populaire ainsi que les acteurs de l’éducation nationale. En ce qui concerne l’audiovisuel, une plateforme « Vrai ou fake » a vu le jour en juin 2018. Elle rassemble les programmes produits par les chaînes publiques qui peuvent être utilisés pour décrypter l’information.

Et les bibliothèques ?

Elles ont pour vocation de donner accès à l’information et d’aider les publics à se repérer sur Internet. Le plan Éducation aux médias et à l’information du ministère de la Culture vient renforcer encore davantage leur rôle dans ce domaine. Les bibliothécaires bénéficient de formations pour développer des actions qui contribuent à lutter contre la désinformation. L’éducation aux médias et à l’information est donc un programme transversal qui s’adresse d’abord aux élèves de collège, avec l’appui de différentes institutions, dont les bibliothèques. Dans ce cadre, il s’agit de délivrer les outils nécessaires à l’évaluation de la qualité des informations et de leurs sources. Cette évaluation est possible à condition de maîtriser aussi le contexte global du fonctionnement des médias et la manière dont l’information est produite, relayée et utilisée.

Plusieurs bibliothèques publiques se sont emparées de cette question. À Toulouse, les bibliothèques de quartier mettent en place, en partenariat avec les collèges de proximité, des ateliers de décryptage des médias. Elles reçoivent les classes et les accompagnent dans la recherche et l’analyse des textes et des images. Les élèves sont aussi invités à rédiger des articles ou à réaliser des reportages photos avec l’aide d’un journaliste. Des résidences de journalistes ont ainsi été mises en place pour permettre aux jeunes de découvrir la fabrique de l’information et suivre les tendances et évolutions médiatiques, y compris en dehors des temps scolaires. C’est le cas, par exemple, à Rouen ou Laval. À la Bpi, le parcours média connaît un grand succès, avec trois ateliers destinés aux collégiens. Dans l’atelier Info/intox, les élèves acquièrent par la pratique quelques principes de recherche et d’évaluation de l’information. L’atelier Construire son opinion permet aux classes de rencontrer des journalistes. Ceux-ci puisent des articles dans l’actualité afin d’alerter les élèves sur la manière dont se propagent les stéréotypes. Ils soulignent également l’importance de la pluralité des sources. Enfin, l’atelier Qu’est-ce que le métier de journaliste ? permet par un retour d’expérience de découvrir la réalité, notamment économique, de la profession.

Une tendance mondiale : la culture de l’information

À l’étranger, l’information Literacy est aussi renforcée au sein des bibliothèques universitaires. Des initiatives souvent ludiques placent les usagers en position d’acteurs : quiz, tournois, avec récompenses à la clé… L’idée est de développer les compétences des jeunes en matière d’analyse d’information tout en étant plaisant et créatif.

Au-delà de L’EMI, qui vise les jeunes dans le cadre scolaire, les bibliothèques élargissent donc leurs offres en lançant des actions originales, stimulantes et astucieuses, pour aider un plus large public à s’investir dans les débats de société et à construire ses propres arguments.