FOCUS
À UNE ÉPOQUE IMMÉMORIALE, OÙ LE 26’’ ÉTAIT ENCORE LE STANDARD DE ROUES ET OÙ LE CARBONE N’ÉTAIT PAS ULTRA RÉPANDU SUR LES BIKES D’ENDURO, LE PIVOT FIREBIRD AVAIT DÉJÀ SUBI L’ÉPREUVE DU FOCUS. ENTRE TEMPS, IL AVAIT DISPARU DE LA GAMME AU PROFIT DU MACH 6,
Peut on avoir un bike de 170 mm de débattement qui pédale (très) bien et descend comme un DH? Après avoir essayé le Pivot Firebird, on vous dit oui!
SUR LE PAPIER
La gamme Pivot est assez prolifique et le Firebird vient s’intercaler entre le Mach 6 et le DH, avec un programme à cheval sur l’enduro et le gravity. Il faut dire que 170 mm de débattement avant et arrière ça commence à compter… Contrairement au Mach 6 pour lequel il existe une version en alu, le Firebird n’est disponible qu’en cadre full carbon. Comme tous les Pivot, il est fidèle à la cinématique de suspension DW-Link développée par Dave Weagle, grand gourou en la matière et qui a notamment à son actif la cinématique du célèbre Iron Horse Sunday de Sam Hill. Ici, on retrouve une suspension à point de pivots virtuels avec deux triangles (le triangle avant et le bras oscillant) articulés entre eux via deux petites biellettes. Les points de pivot sont donc placés constamment à l’intersection des droites formées par ces deux biellettes. L’amortisseur est comprimé par la biellette supérieure via un shock-link qui évite d’interrompre le tube de selle, permettant de maintenir la structure avant complètement fermée afin de garantir une rigidité optimale. En revanche, comme souvent avec ces shock-links, on est un peu chagriné par le montage en porte à faux avec la biellette. C’est un peu trop contrai- gnant pour les roulements et compte tenu du potentiel Gravity du bike, on se demande comment va évoluer cet assemblage dans le temps. Sinon, toutes les articulations profitent d’axes traversants montés sur roulements, c’est tout bon. L’amor tisseur est fixé sous le tube supérieur, ce qui permet d’accéder très facilement au petit levier permettant de durcir la suspension au pédalage, parfait. Petit détail intéressant, le SAG Indicator pour régler facilement la précontrainte, bien vu. Le magnifique bras oscillant au standard Boost est dissymétrique et décalé pour dégager de la place côté transmission. Il est prévu pour accepter des pneus en
2.5’’ sans frémir. On rappelle que le standard Boost, en acceptant des moyeux plus amples, permet d’élargir le parapluie de rayons de la jante et donc d’en optimiser la rigidité et la fiabilité. En ce qui concerne le triangle avant, notez que le bike est compatible avec un dérailleur avant pour les réfractaires du mono plateau et que la partie exposée du tube diagonal est fort bien protégée par une épaisseur de caoutchouc. On trouve même une petite trappe pour ranger les batteries des utilisateurs du groupe Di2 sous le tube diagonal, classe. La géométrie confirme le programme du bike, à mi-chemin entre l’enduro et la DH : un angle de chasse bien couché à 65°, un empattement assez long (1215 mm) et un boîtier de pédalier assez bas pour la stabilité. L’influence DH n’est pas dissimulée… Seul l’angle de selle, qui reste assez droit, prouve que Pivot n’a pas complètement laissé de côté l’enduro lors de la conception de ce nouveau Firebird. À confirmer en action !
ÉQUIPEMENT
Il y a neuf versions (plutôt haut de gamme) du Firebird au catalogue Pivot, avec des options pour encore up-grader le bike… La version testée ici est la Pro XT/XTR 1x où Shimano s’occupe de la transmission en mono plateau avec un panachage des groupes XT pour les commandes et XTR pour le dérailleur. Le tout est associé à un pédalier Race Face Aeffect avec plateau de 30 dents, un super choix pour le programme. Dommage que l’on ne puisse pas en dire autant de la cassette Shimano en 11-46 dont l’étagement nous pose toujours autant de problèmes. C’est surtout à propos des deux derniers pignons que l’on grince, on y reviendra sur le terrain. Shimano s’occupe également du freinage avec des XT et leurs disques de 180 mm de diamètre. Compte tenu du potentiel du bike en descente, on n’aurait pas été contre un disque de 200 mm devant afin de gagner en puissance et en agrément. Pour les suspensions, on trouve un ensemble Fox avec une 36 Factory devant et un Float X2 derrière. Voilà deux éléments très performants qui disposent de tous les réglages nécessaires pour le programme : compression haute et basse vitesse et détente haute et basse vitesse également sur l’amortisseur, basse vitesse sur la fourche. Les roues sont des DT Swiss Spline M1700 en 30 mm de large (interne) chaussées de Maxxis Minion WT (spécial jante large) en 2.5’’. Alors ce n’est pas du Plus, mais force est de constater que le compromis confort/précision obtenu est vraiment super intéressant, parfait pour le programme du Firebird. On trouve également une tige de selle Fox télescopique qui vient parfaire ce beau montage. Un mot enfin sur le poste de pilotage, composé d’un beau guidon carbone doté de grips spécifiques sensés mieux filtrer le terrain grâce à une coupe en biseau sur les extrémités (afin de gagner en épaisseur de caoutchouc). Pas bête. Difficile d’affirmer si le gain est bel et bien là sans avoir eu l’occasion d’essayer le bike sans cet artifice, mais toujours est-il qu’il n’y a pas eu la moindre gêne à ce niveau pendant les tests.
SUR LE TERRAIN
Lorsque l’on prend place aux commandes de ce Firebird, on se sent immédiatement chez soi. Tout tombe parfaitement sous la main, le top tube long incline le buste juste comme il faut, le guidon très large est bien shapé, c’est une invitation à l’attaque. La montée n’est pas laissée de côté pour autant : le tube de selle assez redressé offre une position de pédalage très confortable même dans les montées raides, on ne ressent pas du tout le côté « pédalo » que peuvent parfois avoir des bikes de ce débattement. Le pédalage est d’ailleurs l’excellente surprise de ce test. En effet, si les 170 mm de débattement promettaient monts et merveilles en descente, il faut bien reconnaître que l’on ne partait pas hyper confiant à l’assaut des montées… Mais finalement, le Firebird offre un bon rendement dans sa catégorie, si bien que la première boucle a été rallongée de 300 mètres de D+ tant on était encore frais physiquement après déjà 900 mètres d’ascension ! On ne ressent pas du tout l’effet du gros débattement : le bike reste assez nerveux, avance hyper facilement dans le technique sans jamais buter, avec une suspension qui gomme le terrain sans inter férer avec le pédalage. Dans ce domaine, le Firebird joue dans le haut du tableau et d’ailleurs ses temps sur nos montées de référence en attestent. Ce n’est certes pas un all mountain, mais assurément un bon enduro pour le programme. Seule ombre à ce tableau, l’étagement de la cassette, surtout lorsqu’il faut passer de l’avant-dernier pignon au dernier. Là, on sent vraiment que la vitesse d’ascension diminue. En prime, on se retrouve souvent coincé entre deux vitesses, et soit on force trop et on s’épuise, soit on mouline trop et on n’avance pas. C’est vraiment frustrant, on n’arrive pas à s’y habituer.
Pour la première descente, on est parti directement sur le tracé que l’on utilise pour les tests enduro. On part avec les réglages de base préconisés par le constructeur. Dans cette configuration, le bike est littéralement collé au terrain, peut-être un peu trop même, car il semble avoir du mal à prendre de la vitesse. En revanche, quelle stabilité ! C’est digne d’un DH, ni plus ni moins. Avec une assiette légèrement portée sur l’arrière, le Firebird file droit sans jamais dévier d’un iota de sa trajectoire, quel que soit l’état du terrain. Niveau confort, on sent que le châssis est rigide, mais sans tomber dans les excès de certains constructeurs. Le pilote est tout de même bien épargné, ça ne tape pas dans les bras et les jambes même sur des trails truffés de racines pris à vitesse élevée. En revanche, le vélo manque d’un soupçon de vivacité dans les enchaînements rapides de petits virages. L’avant manque de mordant et on peine à virer court efficacement. Pour ne rien arranger, la suspension arrière est très linéaire et le bike s’affaisse de l’arrière sur les appuis, ce qui a pour effet d’ouvrir un
Le Firebird est un régal sur les trails rapides.
peu trop l’angle de chasse et d’engendrer un peu de sous-virage. On retrouve cette linéarité sur les jumps dotés de réceptions dans le défoncé, où on consomme assez facilement tout le débattement. Pour les runs suivants, on a ajouté quatre clics de compression basse vitesse supplémentaires et deux en haute vitesse. Les effets se font immédiatement sentir : l’assiette du bike est plus équilibrée et, sans perdre un soupçon de stabilité (mais un iota de confort c’est vrai…), on gagne nettement en maniabilité. Le vélo s’inscrit plus facilement en courbe, devient plus précis et surtout plus vif sur les changements d’angle. Nos chronos tombent immédiatement pour venir titiller les meilleurs temps des enduros du Spécial Test ! D’ailleurs sur chacune des descentes que l’on a faites au guidon de ce Firebird, on était toujours très proche du meilleur temps quand on ne faisait pas tout simplement le meilleur ! Ce bike offre vraiment un potentiel génial en descente. Le compromis maniabilité/stabilité est super réussi, on profite d’une adhérence au top sur l’angle en grandes courbes et d’une rigidité bien gérée. Attention, le Pivot reste rigide et demande de la vitesse ainsi que de l’engagement, mais pas besoin d’avoir un physique de bûcheron pour l’exploiter correctement. Il reste d’ailleurs facile à des vitesses plus faibles, notamment sur des parcours qui font la part belle au franchissement. Avec son centre de gravité bas, sa longueur et son angle de chasse ultra ouvert, les passages raides ne sont qu’une formalité. Pas de souci non plus dans les épingles où le bike vire sans problème, en se montrant même très facile. Là encore, le compromis efficacité/plaisir de pilotage est vraiment très bien dosé. En revanche, on reste sceptique sur son programme potentiellement ouvert sur la DH. Pas de problème pour se faire quelques journées en station pour aller tâter de la descente à fond les ballons, mais n’allez surtout pas considérer ce Firebird comme un freeride. Si la vitesse est bel et bien son domaine, les sauts le sont clairement moins : sa suspension arrière est assez linéaire et fait la part belle au confort et à l’efficacité en termes de vitesse pure. Sur les grosses réceptions, on vient assez facilement à bout de tout le débattement. Bien sûr, il y a toujours moyen de serrer encore plus le réglage des hautes vitesses, mais le confort commence alors à en pâtir un peu trop. Pas de souci sur des sauts propres avec de belles réceptions en pente, mais méfiance sur de gros gaps où il faut se poser dans le défoncé. Pour nous, le programme central du Firebird reste l’enduro pur et dur, que ce soit en compétition ou non grâce à l’excellent compromis entre le comportement en descente et celui au pédalage.