Campagne Decoration

PRIÈRE DE GARDER LE SECRET

- PAR PATRICIA PRIOTON

QUAND ISABELLE A FRANCHI LE SEUIL DE CETTE AUSTÈRE BÂTISSE D’AURILLAC, SES PORTES EN OGIVE ET SES PASSAGES VOÛTÉS LUI ONT LIVRÉ LE SECRET DE SON PASSÉ RELIGIEUX. DEPUIS, C’EST ELLE QUI TIENT LES CLÉS DU PARADIS !

c’est la découverte d’un monogramme IHS gravé dans la pierre d’un linteau qui a permis d’identifier la vocation religieuse de la maison.» Pour avoir mis à nu la pierre brute et massive de cette chapelléni­e d’Aurillac, Isabelle en connaît bien l’histoire : « Il s’agit d’un don fait à l’Église en échange de prières pour le Salut de l’âme du donateur», expliquet-elle. Un cadre idéal pour fêter Noël! Lever de rideau sur la pièce commune aux allures de réfectoire monastique où l’on se réchauffe devant le « cantou », une cheminée auvergnate devant laquelle les aïeux s’asseyaient pour raconter des histoires. Celle d’Isabelle et Frédéric, amoureux de l’Auvergne, a commencé par la restaurati­on d’un buron dans la montagne qu’ils ont transformé en gîte. Une petite constructi­on en pierre sèche, perdue dans les monts du Cantal, difficilem­ent accessible l’hiver. Forts de leur expérience, ils décident de racheter une maison de ville dans le coeur historique d’Aurillac. Grâce à leur ami Jean Paul Guilmain, qui a aidé à restaurer le buron, ils dénichent la perle rare. Une ancienne chapelléni­e du XIVe siècle, cachée derrière les hauts murs d’une maison en pierre. Avant de révéler le passé de la bâtisse, défigurée par une restaurati­on sixties, ils ont joué les archéologu­es, mettant au jour des ouvertures murées, des passages voûtés et des portes en ogive. Au rez-de-chaussée, la lumière glisse sur une ancienne ruelle annexée à la maison il y a plusieurs siècles. Un comptoir, récupéré dans la plus ancienne quincaille­rie d’Aurillac, repose sur le sol, autrefois pavé, revêtu d’un simple plancher d’étable brut récupéré dans une ferme des environs. À Noël, Isabelle réinvente à sa manière les liens chaleureux que tissaient les gens du terroir : « C’est là, devant un bon feu de cheminée, que l’on se retrouve une flûte de champagne à la main afin de célébrer Noël à la lueur des bougies.» Ici, on aime s’entourer de meubles et d’objets qui ont une âme. C’est grâce aux nombreux voyages de Frédéric, fondateur de La Fugue (agence de voyages musicaux et culturels), que la Chapelléni­e a pu être meublée «comme si le destin avait décidé de réunir en ces lieux tout ce qu’on avait chiné à travers le monde», s’étonne encore Isabelle. Pour preuve, ces portes en ferronneri­e médiévale, rapportées d’un monastère de Bohême, qui desservent l’escalier.

ATMOSPHÈRE SPIRITUELL­E ET COCOONING Une volée de marches usées par des siècles de passage conduit aux chambres vastes et silencieus­es. L’esthétique y est brute, la décoration dépouillée, laissant les vieilles pierres, les poutraison­s et la patine du temps remonter à la surface. Décapées à la paille de fer puis patinées par l’amie Francine van Hertsen, restauratr­ice de tableaux et de fresques, les boiseries revisitent le décor tout en créant un fil conducteur d’une chambre à l’autre. Au sol, des planches larges, à peine dégrossies, accentuent l’aspect nature. Le centre de ralliement familial se cache sous les toits, dans l’ancien grenier-séchoir où les artisans tanneurs faisaient sécher les peaux. Un écrin de bois à l’esprit chalet où l’imposante charpente répond aux vieilles planches de chêne du sol. Pour casser les codes, une grande table au plateau en béton ciré monté sur un piétement de machine-outil (réalisatio­n du designer lyonnais Axel-Olivier Icard), encadrée de chaises Tolix, jaunes et rouges, s’invite dans le décor d’inspiratio­n industriel­le. Aujourd’hui, cette maison d’hôte pas comme les autres est un repaire secret, pieusement gardé et une adresse qui se murmure à l’oreille.

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/ PHOTOS CLAIRE CURT
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LE MOBILIER INDUSTRIEL cohabite avec aisance avec le bois. La longue table en béton ciré accueille les gourmands avec des cornets de Murat (Pâtisserie Troupenat, à Aurillac). Vases tricot (Angel des Montagnes).
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TELLE UNE CELLULE, cette chambre fermée par un simple pan de tissu offre un havre de paix tout en simplicité.

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