MIEUX QU’UN JARDIN D’HIVER
CERNÉE PAR L’AZUR DE L’OCÉAN, L’ÎLE AVEC SA VÉGÉTATION LUXURIANTE EST UN VRAI PARADIS. ENTRE CÔTES ACCIDENTÉES EN À-PIC, FORÊTS À PERTE DE VUE ET VALLÉES EN TERRASSES, L’ARCHIPEL VOLCANIQUE CULTIVE SON ART DE VIVRE.
Les deux richesses de l’île : sa flore et son héritage portugais
DÉCOUVERTE PAR ACCIDENT, AU XIVE SIÈCLE, PAR UN ÉQUIPAGE LUSITANIEN AU BORD DU NAUFRAGE, MADÈRE SOIGNE DEPUIS LES VESTIGES DE SON PASSÉ PRESTIGIEUX, POUR LE PLUS GRAND BONHEUR DES VISITEURS. Azulejos, artisanat de la vannerie, du cuir, de la broderie, exploitation de la vigne et de la canne à sucre ont porté la renommée de l’archipel au-delà des mers.
c’est un caillou volcanique recouvert de forêts de lauriers et d’eucalyptus, un mélange de parfums capiteux, des piscines naturelles creusées par la lave. C’est aussi la trace de la main de l’homme, qui a apprivoisé les pentes escarpées en terrasses, irriguées par un système de canaux, les levadas. On vient à Madère pour la douceur de son climat (entre 16 et 25 °C toute l’année), pour prendre un peu de hauteur aussi, juché sur le volcan qui multiplie les points de vue, comme celui du belvédère de Pico dos Barcelos, au-dessus de Funchal. La richesse de Madère réside surtout dans ses paysages diversifiés, rarement réunis sur une si petite superficie. La côte sud, populaire, protégée des alizés dominants, est la plus calme, tandis que la côte nord, montagneuse, offre un spectacle de bleu, de vert et de blanc dû aux assauts incessants de l’Atlantique qui dessine son relief. Au retour d’une excursion en ferry à Porto
Santo, à la nuit tombante, surgit la côte sauvage de Madère, telle qu’ont pu la contempler, en leur temps, les premiers explorateurs. Car la découverte de cette langue de terre, c’est l’histoire d’un naufrage qui finit bien. Au début du XIVe siècle, de jeunes navigateurs portugais pris dans une tempête au large de la Guinée sont repoussés par les ressacs sur une petite île qu’ils baptisent Porto-Santo. Ils aperçoivent à l’horizon, à une trentaine de kilomètres, un imposant volcan couvert d’épaisses forêts qu’ils décident d’explorer l’année d’après. Ainsi, le 1er juillet 1419, l’équipage mené par João Gonçalves Zarco (1390-1470) contourne le nord de l’île, inabordable avec ses falaises en à-pic, et accoste au sud. La végétation luxuriante est une source d’inspiration pour Zarco, qui prénomme l’île déserte Madeira, « l’île du bois », et la capitale qu’il fonde, Funchal, d’après le portugais funcho, « fenouil ». Dès 1470, des esclaves venus d’Afrique participent à l’exploitation agricole de la canne à sucre. Avec le bois précieux, elle constitue pendant des siècles l’essentiel de l’économie de Madère. Et puis Funchal, situé à 1 000 kilomètres de Lisbonne et 600 kilomètres des côtes africaines, est l’escale
idéale sur la route des explorateurs. Les caravelles y font le plein de vivres et de mâts. Concurrencée par le Brésil au XVIIe siècle, l’île est
délaissée. Au XVIIIe siècle, elle tente néanmoins de trouver une issue et augmente sa production du fameux vin de Madère, dont la consommation se développe en Europe, et devient alors le port d’acclimatation de la bonne société partant ou revenant des colonies d’Inde ou d’Afrique. La douceur de Madère, à juste titre surnommée le Jardin flottant ou la Perle de l’Atlantique, séduit aujourd’hui les amoureux de la nature. L’archipel regroupe des îles désertes et sauvages, véritables réserves naturelles peuplées de phoques moines protégés, et deux îles habitées, Madère et Porto-Santo.
Funchal, sa capitale colorée et animée est désormais le centre du commerce de l’île et constitue l’une des escales principales pour les immenses paquebots de croisière de l’océan Atlantique. On y découvre le Mercado dos Lavradores, le « marché des fermiers », à arpenter le matin dès 7 heures en compagnie des locaux, avant l’arrivée en masse des touristes. Là, les fleuristes hèlent le passant en agitant des perroquets, ces drôles de fleurs qui ouvrent grand leur bec. On y trouve un bon aperçu de la diversité des fleurs et fruits exotiques, des poissons, ainsi que de l’artisanat local. La journée idéale ? Prendre le téléphérique de Funchal qui se perd dans la brume jusqu’aux Jardins tropicaux Monte Palace, respirer les odeurs d’humus et d’eucalyptus dégagées par la végétation, visiter le jardin et l’église voisine, avant de redescendre par la Levada dos Tornos, chemin qui longe les traditionnels canaux d’irrigation, jusqu’au Jardin botanique. Et finir la journée en dînant dans l’un des restaurants de poisson du quartier Santa Maria ou au bord de l’eau, au Lido.
On peut également tester les étranges carros de cesto. Autrefois, les riches Madériens, propriétaires de résidences accrochées aux flancs de Monte, descendaient à Funchal dans ces voitures d’osier à deux places, montées sur patins. Ils parcouraient ainsi 2 kilomètres, guidés par des « carreiros », toujours vêtus de blanc, d’un chapeau de paille et de bottes solides qui leur permettent de freiner avec les pieds. Vous l’aurez compris, Madère cultive aussi son image pittoresque…