Caran d’Ache, au royaume de la couleur
À THÔNEX, À QUELQUES ENCABLURES D’ANNEMASSE, LA MAISON D’ÉCRITURE SUISSE (C)RAYONNE À L’INTERNATIONAL DEPUIS PLUS DE CENT ANS.
Il n’y a pas d’âge pour colorier ! » nous glisse en souriant Carole Hubscher, présidente de cette manufacture familiale fondée en 1915 à Genève sous le nom de Fabrique Genevoise de Crayons. « Ne sous-estimons pas le pouvoir déstressant du dessin. C’est un vrai moment de relaxation, qui fait du bien et nous rappelle qu’il faut savoir prendre du temps pour soi, se faire plaisir, se détoxifier de nos chers écrans… » L’ironie voulant néanmoins que les réseaux sociaux ont, ces dernières années, largement contribué à la redécouverte des activités manuelles et graphiques ainsi qu’à la valorisation de la créativité…
LE POUVOIR DES COULEURS
Car si l’on a tous connu, enfant ou écolier, les instruments de dessin et d’écriture Caran d’Ache – qu’il s’agisse de feutres aquarellables, de gouaches, de crayons graphites ou de portemines (dont la maison a d’ailleurs breveté l’invention en 1929), force est de constater que nos vies d’adultes avaient parfois enfoui cette jolie madeleine de Proust. Caran d’Ache, ce sont pourtant aussi des stylos endurants, parfaits pour le bureau ou le quotidien : on retiendra notamment « Ecridor », le tout premier stylo-bille conçu en 1953, ou encore « 849 » (ci-contre) devenu best-seller qui, tous deux chargés de la cartouche géante Goliath, revendiquent 8 kilomètres d’écriture, soit 600 pages A4 d’un seul trait. Mais la Maison s’inscrit aussi plus que jamais dans l’air du temps, s’attachant de prestigieuses collaborations artistiques : le créateur Paul Smith en tête (qui signe la dernière collection aux rayures iconiques en édition limitée), les designers India Mahdavi ou Claudio Colucci, le héros de bande dessinée Titeuf, les architectes Kengo Kuma ou Peter Marino… Innovante et très engagée dans le développement durable, l’entreprise s’est par ailleurs associée à Nespresso pour relever un pari audacieux : celui de fabriquer des stylos à partir de l’aluminium recyclé des capsules usagées. La troisième édition vient de voir le jour, gravée de la mention « Made with recycled Nespresso capsules » et parée du violet profond et satiné « Arpeggio », obtenu grâce à un procédé de microbillage et traitement électrostatique. La couleur, toujours !
« Derrière chaque couleur, une recette différente. » Éric Vitus, chimiste intarissable et passionné, est le « Monsieur Couleur » de Caran d’Ache.
34 étapes, soit une cinquantaine d’heures de travail, sont nécessaires pour produire un crayon de couleur. «Chaquejour, la distance de Genève à Rome estproduite encrayons», s’amuse Carole Hubscher, la présidente.
Les mines sont trempées dans la cire, puis entre 2 et 8 couches de vernis aqueux (sans solvants) sont apposées pour donner au crayon sa qualité et sa robustesse.
Picasso et Karl Lagerfeld n’ont jamais caché leur prédilection pour les « Neocolor », incontournables pastels à la cire signés Caran d’Ache.