Le panda, acteur du soft power de la Chine
Le 4 août 2017, au zoo de Beauval (Loir-et-Cher), naissait Yuan Meng, un panda de 142,4 grammes dont le baptême en décembre fut l’occasion pour Brigitte Macron de prononcer son premier discours en tant que première dame. Loin d’être anecdotique, la « dipl
Le panda, acteur du soft power de la Chine Asie-Océanie
La dimension plurielle de la puissance dont veut se doter une République populaire trop souvent cantonnée, par l’opinion publique et la communauté internationales, à son rôle économique est essentielle. Afin de montrer un visage acceptable, voire séduisant, la politique chinoise ne se sert plus exclusivement des éléments traditionnels du pouvoir étatique que sont l’armée ou le commerce. C’est désormais par les outils du soft power que passe la promotion de la puissance chinoise ; la « diplomatie du panda » en est l’un des éléments emblématiques. Prêter cet animal, considéré comme un « trésor national » et ne vivant à l’état sauvage qu’en Chine, à d’autres nations permet non seulement à Pékin de renforcer ses relations diplomatiques, mais également de soigner son image. La présence de chefs d’État lors des cérémonies de présentation des pandas montre l’importance symbolique et politique que revêt l’événement. En avril 2017, le président chinois, Xi Jinping (depuis 2013), se félicitait, lors d’une visite officielle en Finlande, de l’arrivée de deux de ces ursidés dans le pays. Le prêt de deux spécimens aux Pays-Bas en mai 2017 avait, quant à lui, été scellé lors d’une visite officielle à Pékin du roi Willem-Alexander (depuis 2013) en octobre 2015, après seize ans de négociations. En juin 2017, c’est au tour de Berlin d’en accueillir, en présence de la chancelière, Angela Merkel (depuis 2005), et de Xi Jinping. La « diplomatie du panda » existe en Chine depuis le VIIe siècle. Des traces remontant à la dynastie Tang (618-907) montrent que deux pandas géants avaient été offerts à la cour du Japon par l’impératrice Wu Zetian (690-705). Puis Tchang Kaï-chek (1943-1948) et Mao Zedong (1949-1976) ont relancé cette pratique longtemps tombée en désuétude. Après la visite historique du président américain Richard Nixon (1969-1974) en Chine en 1972, Mao offre deux animaux à Washington. Entre 1958 et 1982, 23 pandas sont envoyés dans neuf pays différents. Puis, sous la pression des associations de protection animale, la République populaire ne fait plus cadeau de ces animaux protégés, mais les loue – pour les deux spécimens actuellement en France, Paris paie la somme de 750 000 euros par an. En prêtant six pandas à trois États européens en 2017, Xi Jinping a accéléré cette pratique diplomatique. Elle s’inscrit néanmoins dans le tournant géopolitique que prend la Chine depuis plusieurs années. Le soft power, officiellement adopté comme principe politique lors du XVIIe Congrès du Parti communiste chinois en 2007, est un enjeu important pour Pékin. Les autorités en ont conscience et investissent massivement, tant sur le plan économique que politique, afin de maximiser la capacité d’attraction du pays. En donnant une image rassurante de la Chine, le panda s’inscrit dans la stratégie de l’« émergence pacifique » ; en tant qu’« atout coeur » de la politique chinoise, il est un ambassadeur à la fois efficace et rentable.