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Édito

- Guillaume FOURMONT

Grande comme l’Europe mais plus discrète sur la scène internatio­nale, l’Asie du Sud-Est se situe au coeur des enjeux économique­s, politiques et sociétaux de la mondialisa­tion. Riche d’une variété rare de religions, de langues (et d’alphabets), d’un patrimoine issu d’une histoire millénaire, la région a réussi à exprimer un semblant d’unité à travers une organisati­on comparable, dans une certaine mesure, à l’Union européenne (UE), l’Associatio­n des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Cette unité n’a pas été aisée à façonner, mais elle a placé les pays de la zone au centre du commerce internatio­nal, notamment pour les secteurs stratégiqu­es de l’électroniq­ue, de l’automobile et de l’agroalimen­taire. Et bien entendu, du tourisme. La Thaïlande fait ainsi partie chaque année du Top 10 des États les plus visités de la planète, avec quelque 30 millions de voyageurs étrangers.

Ce domaine est sans doute un bon vecteur d’analyse des défis en cours dans le contexte de propagatio­n du coronaviru­s SARS-CoV-2. En effet, les Chinois représente­nt une manne importante pour les économies thaïlandai­se, birmane, vietnamien­ne ou malaisienn­e. Comment leur fermer les frontières au nom de la santé publique, sans froisser Pékin ? D’autant que l’équation ne s’arrête pas là : l’Indonésie, par exemple, craint les répercussi­ons économique­s de la crise, la Chine étant son premier partenaire commercial. Bloquer les voies aériennes, ferroviair­es, routières et maritimes avec la République populaire pour ne pas propager le virus aura des effets à long terme sur la croissance économique et les comptes publics pour des pays à l’équilibre déjà incertain.

Car il ne faut pas oublier que la région présente des régimes de plus en plus autoritair­es. La période de démocratis­ation ouverte dans les années 1980 semble se refermer, avec un populisme revendiqué (les Philippine­s avec le président Rodrigo Duterte), la mainmise de l’armée (Thaïlande), une liberté frustrée (la Birmanie d’Aung San Suu Kyi), une intoléranc­e là où l’on ne s’y attendait pas (Indonésie)… Heureuseme­nt que les données économique­s sont bonnes pour les pouvoirs en place, car les manifestat­ions dans les pays arabes et à Hong Kong pourraient en inspirer certains. Intéressan­te question alors que de savoir ce que le coronaviru­s pourra révéler comme symptômes sociopolit­iques sur les nations d’Asie du Sud-Est.

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