VU D’EN HAUT
Située dans le sud-est de la Grèce, en Attique, Athènes est une métropole dont le passé glorieux attire un tourisme de masse. Elle est aussi le symbole d’une capitale macrocéphale en pleine recomposition, centre névralgique de flux diversifiés d’un pays en crise.
Athènes est célèbre pour ses héritages historiques et son tourisme patrimonial. L’hypertrophie de cette fonction touristique se lit dans le paysage, la colline de l’Acropole organisant le plan de la ville depuis le XIXe siècle en fonction d’une concentration des lieux de pouvoirs dans l’hypercentre. Attirant près de 3 millions de visiteurs en 2017, le secteur de l’Acropole a également bénéficié d’une piétonnisation, assise par la création du métro et du nouveau musée, le tout réalisé à l’occasion des Jeux olympiques de 2004. Bien que leur bilan soit controversé, ces derniers ont été le moment de repenser l’urbanisation de cette capitale tentaculaire dont l’agglomération polarise quelque 4 millions des 10,47 millions d’habitants (2019) du pays. On distingue en effet le nouvel aéroport Venizelos, à l’est sur l’image, au milieu de la plaine agricole, construit pour capter des flux grandissants de touristes. Une autoroute et une ligne de métro permettent de le desservir depuis le centre-ville, mais également de contourner au nord ce dernier afin de connecter la partie nord-ouest de l’agglomération (Eleusis et sa zone industrielle) et le Péloponnèse. Ces deux infrastructures de transport ont aussi tenté de guider l’urbanisation vers l’est de façon à limiter le mitage des montagnes boisées au nord (mont Parnitha ou Parnès) ou entre l’agglomération et la plaine agricole (mont Ymittos ou Hymette) à l’est, et à desservir les différents sites des JO.
LA MER : ATOUT DE LA MÉTROPOLE
Coeur d’une Grèce mondialisée par son patrimoine, Athènes est aussi une capitale littorale qui veut développer tourisme et loisirs balnéaires. L’est de l’image montre les indentations d’une côte aux plages de sable dont les plus fréquentées sont celles situées à proximité de l’aéroport. On distingue sur le front de mer, à l’ouest, l’ancien aéroport d’Hellinikon dans la partie sud de l’agglomération qui est l’objet d’un projet de réaménagement polémique. Si sa partie nord a servi provisoirement pour les JO et a bénéficié d’aménagements (métro et tramway), cet espace constitue une friche urbaine de 3,5 kilomètres de linéaire côtier d’une superficie équivalente à Central Park, à New York. En 2011, une Grèce plongée dans la crise depuis trois ans vend ce terrain à une société aux larges capitaux chinois, non sans susciter de vives critiques sur le bradage des biens de l’État. Outre le projet pharaonique de type waterfront initialement prévu, cela pose la question de la privatisation de l’espace public, d’autant que le port du Pirée, plus au nord, est aussi le symbole de l’implantation chinoise en Europe. Pensé dès 2009, le rachat par la compagnie de fret étatique chinoise COSCO de 67% du port en 2016 s’inscrit dans la stratégie des nouvelles routes de la soie pour propulser le port d’Athènes en tête d’un marché vers l’Europe centrale et occidentale. Au prix d’une précarisation de l’emploi et d’une productivité par travailleur accrue, 80 % des échanges Chine/ Europe passent par le Pirée, deuxième port de la Méditerranée en trafic de conteneurs. Une deuxième plate-forme de stockage de conteneurs juste à côté de l’île de Salamine est ainsi créée. Le Pirée est aussi connu des Athéniens et des touristes pour son port de ferries, qui est le support des flux touristiques en direction des Cyclades, qui accueillent un tourisme interne fort (presque 6 millions de voyages en 2017) et 4 millions de touristes internationaux en 2018. Il n’est pas surprenant de voir émerger à la jonction des parties sud du littoral (ancien aéroport) et nord (ports de plaisance adaptés aux yachts et port du Pirée), à la place du centre hippique déplacé avec les JO, un nouvel espace symbolique. En 2017, la fondation Niarchos, d’un armateur grec, y a financé un centre culturel conçu par Renzo Piano et composé de l’Opéra national et de la Bibliothèque nationale, entourés d’un immense jardin connecté à la baie, tentant d’établir une offre ludique, sportive et culturelle dans la compétition internationale que se livrent les métropoles touristiques pour capter les flux de voyageurs. C’est aussi la volonté de changer l’image d’une capitale en crise devenue l’une des portes d’entrée de l’Union européenne (UE) pour des migrants. Une façon de montrer que culture et loisirs peuvent contrecarrer un discours xénophobe et soulager la paupérisation d’une population ?