Badawi : le silence des sénateurs
mais rien sur Raïf Badawi ni sur sa femme, Ensaf Haidar. Elle s’était pourtant donné la peine de se déplacer jusqu’en France pour médiatiser son combat pour la libération de son mari * : il a pris dix ans de prison pour avoir tenu un forum Internet de libres penseurs critiques envers le régime. Sa peine de mille coups de fouet a été suspendue grâce à l’indignation mondiale. Comme quoi, quand l’opinion internationale s’en inquiète, cela permet de faire bouger les lignes. Certes, Nathalie Goulet a, en juin dernier, cité le cas du blogueur dans une question d’actualité au gouvernement. Elle a même clos son intervention par un retentissant : « Notre pays est celui des Rafale, mais c’est aussi celui des droits de l’homme ! » Pourtant, lors du colloque, en face à face avec l’un des chefs de la police saoudienne, la voix lui aura comme manqué. Le 6 mai, le travailliste Sadiq Khan a remporté les élections pour la mairie de Londres après une campagne très marquée à gauche, axée sur la baisse des loyers dans la capitale, l’aide aux plus démunis et l’avenir du Royaume-Uni dans l’Union européenne. Ce n’est pas ce que vous avez retenu ? Pas étonnant, car le jour de sa victoire, les médias français ont davantage parlé de la religion de l’heureux candidat que de ses idées. Ainsi, durant les JT de 20 heures de TF1, France 2 et France 3, le mot « travailliste » a été cité sept fois, contre dix pour « musulman ». Il a été fait six fois référence à l’ « origine pakistanaise » du nouveau maire de Londres, comme au fait qu’il soit « issu de l’immigration ». On n’est pas à un paradoxe près : on bassine les Français(e)s avec la laïcité alors que les émissions de télé les plus regardées s’intéressent plus à l’appartenance confessionnelle d’un homme politique qu’à son programme.