Causette

Marche arrière toute sur la GPA

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L’Inde ne veut plus être l’eldorado du « tourisme procréatif » . Fin novembre, sa ministre de la Santé a déposé un projet de loi à la Maison du peuple (l’une des deux assemblées parlementa­ires du pays) en vue d’interdire la GPA ( gestation pour autrui) commercial­e – légalisée en 2002. Également en ligne de mire : les célibatair­es, les couples étrangers, homosexuel­s ou avec enfant(s), qui n’auront plus le droit de faire appel à une mère porteuse. Le texte, déjà adopté en août par le gouverneme­nt, vient entériner un vrai changement de cap. « C’est la première fois qu’un [tel] projet de loi est déposé au Parlement. Mais l’accès à la GPA a déjà été progressiv­ement restreint depuis 2013, entre autres parce que les autorités indiennes ont décidé de ne plus délivrer de visas de sortie aux nouveau-nés dont les parents ne réuniraien­t pas les critères émis par le gouverneme­nt, à savoir : couples hétérosexu­els, mariés, avec une infertilit­é avérée et indiens », décrypte Virginie Rozée, chercheuse à l’Institut national d’études démographi­ques ( Ined), qui a enquêté pendant deux ans sur place

Selon le gouverneme­nt, la GPA était pratiquée dans 385 cliniques en 2015 – certaines associatio­ns estiment qu’il y en a jusqu’à 3 000 – et concernera­it 2 000 couples par an. Des chiffres flous, sur un sujet qui, en Inde, ne fait pas vraiment débat, explique Virginie Rozée. Pourquoi, alors, ce revirement ? « Après les différents scandales qui ont éclaté en Asie, comme celui du bébé Gammy l’Inde ne veut pas faire figure de mauvais élève concernant l’exploitati­on des femmes ou le “commerce de bébés” », répondelle. Mais les parents étrangers en quête de mères porteuses, eux, ne renoncent pas : ils changent désormais de destinatio­n et s’envolent vers le Kenya ou le Cambodge. Quand il s’agit de s’en prendre aux femmes, le gouverneme­nt polonais a plus d’un tour dans son sac. Après avoir tenté d’interdire totalement l’avortement, le parti ultra conservate­ur Droit et Justice (PiS, très proche de l’Église), au pouvoir depuis novembre 2015, a annoncé début décembre vouloir sortir de la Convention d’Istanbul. Ratifié par quatorze pays européens, ce texte fixe depuis 2014 des règles très précises en matière de prévention et de lutte « contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique ». Mais visiblemen­t siègent au gouverneme­nt des âmes très sensibles, qui ne supportent pas qu’il soit question dans le texte de « genre » et non de « sexe »… Et tant pis pour les victimes, donc. Pourquoi dire « droits humains » plutôt que « droits de l’homme » ? Peut-être parce qu’il « existe un mot qui me désigne autant que celui né masculin et qui attend d’être employé à bon escient » a plaidé Anne-Sophie Reinhardt, qui a remporté le concours d’éloquence, organisé par le collectif Droits humains pour tou-te-s ( Causette était dans le jury !). Deux jours avant, 81 parlementa­ires appelaient aussi la France à privilégie­r l’expression « droits humains » et à mettre fin à une « exception française » qui « crée une exclusion qui n’est pas uniquement symbolique ». Combat futile, estiment certain-e-s. Mais alors, pourquoi tant de résistance­s ? On se le demande !

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