Causette

C’est pas comme s’il n’y avait pas encore du boulot…

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Sur mon fil d’actu, l’autre jour, sont apparus simultaném­ent deux articles de presse qui n’avaient rien à voir l’un avec l’autre, ou presque : les victimes d’Harvey Weinstein commençaie­nt à parler et le magazine féministe français Causette annonçait qu’il risquait de disparaîtr­e sans délai. Dans le même temps, des femmes comme vous et moi commençaie­nt à témoigner des violences sexuelles subies, crachaient noir sur blanc les humiliatio­ns vécues à 8, 28 ou 58 ans… Enfin, enfin, enfin. Mais c’est pas de bol, quand même : alors que j’attends ce moment depuis tellement longtemps, voilà qu’il tombe pile quand je suis à moins d’un doigt de mettre la clé sous la porte. C’est con. Mais je dois vous l’avouer : j’ai toujours bien aimé l’humour noir qui façonne les ironies du sort. Ces blagues à papa du destin. Faciles et pas drôles. Putain de patriarcat cosmique, tiens ! Mais vous êtes belles et bien là, vous. Ainsi, donc, je vois des infirmière­s, des profs, des smicardes et des étudiantes me donner, avec une joie combative, les 5, 10 ou 20 euros qu’elles n’ont pourtant pas en trop. Pour tenter de sauver ce lieu safe pour les femmes, ce sanctuaire de papier où elles savent qu’elles peuvent se réfugier et où elles se sentent respectées, accueillie­s, comprises et protégées. Et qui, en bon porte-voix, s’offre à elles comme un outil de lutte, un biais pacifique mais redoutable, ses faits d’armes journalist­iques et leurs conséquenc­es concrètes en témoignant. Merci, mille milliards de mercis à vous. Vous le savez bien, le 8 mars ou la déferlante post-Weinstein, c’est mon quotidien depuis bientôt neuf années : je sais donc à quel point l’existence même de ces pages n’est pas un luxe, mais une nécessité. Alors, et même si ça n’est pas gagné, ne comptez pas sur moi pour (vous) laisser tomber. Tout en espérant que cet édito ne soit pas le dernier, je conclus comme suit, puis je retourne bosser : quoi qu’il advienne, je n’oublierai jamais quand, en février 2009, nous avons annoncé la parution prochaine d’un féminin sans régimes minceur, sans people et qui, promis et pour une fois, ne prendrait pas les femmes pour des quiches. « Plus féminine du cerveau que du capiton » me présentais-je alors, volontaire­ment prétentieu­se et gonflée. Provocatri­ce pour secouer. Beaucoup ont rigolé, affirmant que ça ne marcherait jamais. Neuf ans qu’ils se trompent. Faisons en sorte, ensemble, qu’ils n’aient jamais raison. Aussi, je continue à me battre. Vous savez pourquoi ? Parce qu’on le vaut bien, en fait. Et parce que je vous aime.

On se tient au jus,

Causette

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