Cestac au taquet
Elle raconte (entre autres) son Mai 68 dans le tome 2 de Filles des oiseaux. Un peu d’autobiographie, beaucoup d’observation et de l’humour, passionnément ! Pour Causette, Florence Cestac a bien voulu imaginer des dessins originaux pour illustrer notre dossier. Faut dire que Mai 68, ça lui rappelle des souvenirs à Florence…
CAUSETTE : Votre plus beau souvenir de Mai 68 ?
FLORENCE CESTAC: Tout ! Je sortais d’un pensionnat de bonnes soeurs et d’une famille d’un ennui total… Mon ciel s’est éclairé brusquement, et j’ai tout envoyé péter ! J’avais 18 ans, je venais de m’inscrire aux Beaux-Arts de Rouen. À la maison, il n’y avait pas de livres, on n’écoutait pas de musique... tout ça m’est tombé dessus ! Et puis, on s’est mis à fonctionner en bande, on montait à Paris à huit dans une voiture, on chantait, on buvait, on réfléchissait, on allait changer le monde et se débarrasser de celui-ci, tout gris. Et surtout, on y croyait. L’espoir était partout.
Êtes-vous d’accord pour dire que les femmes n’avaient pas la parole en 68 ?
F. C. : Oui, les mecs étaient dans la lumière, c’est sûr. Mais on était très présentes partout. Sur le coup, on voulait tout changer, mais pas spécifiquement la condition des femmes. Personnellement, c’est grâce à 68 que j’ai pris conscience, comme beaucoup, des luttes à venir pour les femmes. Pour la contraception, l’avortement… Après, j’ai fait toutes les manifs, je me suis engagée.
Votre pire souvenir de 68 ?
F. C. : La tôle ! Eh oui, j’ai fait dix-huit jours de préventive pour vol et destruction d’emblèmes nationaux ! En clair, avec des potes, le 14 juillet 1968, on a arraché les drapeaux, on a découpé le bleu et le blanc, et on a hissé le rouge ! Ça rigolait pas à l’époque : direct en prison. Je déprimais, seule dans ma cellule. Du coup, j’ai demandé à travailler. La tâche consistait à fabriquer des bouquets de violettes en plastique pour des couronnes mortuaires, à 10 centimes le bouquet… Ça m’a pas remonté le moral !