BAD FEMINIST UN AUTRE FÉMINISME EST POSSIBLE !
Il y a quatre ans, Time Magazine avait déclaré l’année 2014 « année Roxane Gay » : cette quadra d’origine haïtienne venait de publier An Untamed State, son premier roman, et le recueil d’essais Bad Feminist, qui devint best-seller et fit d’elle un nouveau genre de porte-parole. Le premier fut traduit chez nous l’été dernier ( Treize Jours, éd. Denoël). Voici enfin le second, qui donne à comprendre le phénomène : recueil d’articles publiés initialement dans The Guardian, Bad Feminist est un coup de semonce de presque cinq cents pages. Dès la première, cette obèse assumée et bisexuelle revendiquée y démontre comment l’écriture l’a libérée de la « culture du viol », elle qui en fut victime à 12 ans. Par la suite, elle ausculte la pop culture américaine actuelle (séries, films, romans sur l’esclavage ou le racisme, de Cinquante Nuances de gris à Django Unchained en passant par les essais exigeants de Judith Butler), par le prisme du genre, de la classe sociale et de la race. Roxane Gay revendique vivre selon certains clichés (le dressing hyper fourni et en rose) et propose d’en finir avec un féminisme excluant. Le sien est décomplexé, loin des théories moralisantes, et insurrectionnel : « Le principal est d’être plus inclusif et de penser aux intérêts de femmes qui ne nous ressemblent pas forcément. Femmes de couleur, queer ou issues des classes populaires. » Bad Feminist est radical sans être dupe, et se situe autant du côté des gender studies que des stéréotypes. C’est une ode à la culture, à la responsabilité, pour inventer les formes d’une nouvelle façon de penser. Donc de (se) vivre.