DÉSIR ET DES LUNES

D’histoire, il n’y en a pas vraiment.

La romancière Anna Dubosc n’a jamais eu besoin d’aller loin pour nous dépayser, ni d’effets spéciaux pour nous bluffer. Dans son précédent livre, Koumiko, une merveille, elle avait simplement câblé nos cerveaux de lecteurs à celui de sa mère, la poétesse Koumiko Muraoka, atteinte de la maladie d’Alzheimer, et avait laissé la bobine se dérouler. Ici, avec Nuit synthétique, elle nous emmène, en caméra subjective, dans la vie et les nuits du désir féminin lui-même. Un désir félin, orgueilleux, fugitif et capricieux qu’elle laisse déambuler dans nos esprits sous les traits d’une jeune Parisienne qui pourrait tomber amoureuse de son ombre. « T’es sûre que tu veux ? » lui dit un jour l’un de ses amants fou de désir au milieu des herbes humides du parc de Rambouillet. Entre Gare de l’Est, les arènes de Lutèce, Pantin, le canal Saint-Martin, Anna Dubosc traque les traces immédiates laissées par Éros : l’odeur, la moiteur, les mots doux, les fantasmes. Ces émotions solitaires, bien plus tangibles que le réel, dont la romancière nous projette des images puissantes, gracieuses et addictives.

Nuit synthétique, d’Anna Dubosc. Éd. Rue des promenades, 140 pages, 17 euros.