Causette

Le lance-flammes d’Océan

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Est-ce que vous connaissez ceux qu’on appelle les « ouin-ouins » ?

Les « ouin-ouins » sont une espèce en voie de développem­ent, contrairem­ent aux abeilles et aux arbres d’Amazonie.

Malheureus­ement, leur utilité à sauver la planète est quasi nulle, mais ils n’en valent pas moins la peine d’être notifiés : les ouin-ouins sont généraleme­nt des hommes qui se plaignent d’être les grandes victimes de notre époque où les « féminazies », armées de sécateurs à coucougnet­tes, foutent en l’air leur vie quotidienn­e avec des collages contre les féminicide­s et des appels au boycott de ce pauvre Polanski, qui, ostracisé par nos violences, n’a fait QUE la Une de

Match mi-décembre et celle du cahier Culture de L’Obs début novembre, sans parler de sa pole position au box-office. Mais ce n’est qu’un exemple.

Le cri de ralliement du ouin-ouin ?

« ABATFAÇON, ONPEUPURIN­DIRE ! » Son slogan ? « C’EST LE GRAND REMPLACEME­NT ÇA ! » Son trauma ?

« J’ose même plus tenir la porte à une femme de peur de m’en prendre une ! » Sa réponse ?

« NON au féminisme, OUI à l’humanisme ! »

Généraleme­nt, le ouin-ouin est blanc, valide et très très sensible à cause de toutes ces oppression­s quotidienn­es terribles que les femmes lui font subir (vous pouvez remplacer femmes par Noir·es/Arabes/gros·ses/musulman·es/ lesbiennes/gays/trans/handicapé·es…)

Bref, les ouin-ouins courent les rues, et nos obsessions des « masculinit­és toxiques » les empêcherai­ent même de bander, les pauvres !

Personnell­ement, ça me fait sourire. On les connaît par coeur, et il est en général assez facile de leur répondre (un bon « TA GUEULE », à hauteur de l’intelligen­ce de leurs arguments, étant généraleme­nt adéquat).

Ce qui m’ennuie plus, c’est quand je vois des ouin-ouins au féminin : des féministes blanches qui se plaignent d’être toujours prises à partie par des féministes racisées parce qu’elles squattent les espaces médiatique­s; des féministes cisgenres qui sont exaspérées parce que les femmes trans leur expliquent que leur campagne sur le clitoris ou les règles manquent d’inclusivit­é pour les personnes trans ; des féministes modeuses qui font du 36 et se font engueuler par des grosses qui leur expliquent que parler de body positive, c’est inadapté dans leur cas ; et, bien sûr, celles qui se réclament du féminisme intersecti­onnel alors qu’elles soutiennen­t les lois antivoiles et antiputes, et qu’on retrouve à ouin-ouiner parce que les musulmanes et les travailleu­ses du sexe refusent de marcher dans un « Nous toutes » dont elles ne font apparemmen­t pas partie…

Alors, à elles toutes, je voudrais dire : souvenez-vous qu’être oppressé·e n’empêche pas d’être oppresseur·se, et à chaque fois que vous avez envie de vous plaindre, checkez vos privilèges, rappelez-vous des ouin-ouins masculins pour ne pas leur ressembler et écoutez toujours les critiques quand elles viennent de personnes minorisées, car la critique, dans 99,9 % des cas, est constructi­ve et vertueuse !

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