Causeur

Italie : que trafiquent donc les ONG ?

- Par Mauro Zanon

Les récits de sauvetage in extremis de migrants africains au large des côtes italiennes que publient régulièrem­ent les médias ont de quoi retourner les coeurs les plus secs. Mais sont-ils toujours crédibles ? En Italie, bien des gens se posent la question depuis des années, mais personne n’osait trop en parler. On peut même dire que les connaisseu­rs de ces questions savaient qu’il y avait un loup, mais préféraien­t regarder ailleurs : il est souvent suicidaire de prendre à rebrousse-poil l’émotion légitime suscitée par les drames humains à répétition et les images terribles qui les accompagne­nt.

Mais l’horreur peut-elle servir de paravent au mensonge, voire au viol de toutes les lois en vigueur sur l’immigratio­n illégale ? Ce n’est pas l’avis de Carmelo Zuccaro, le procureur de Catane, en Sicile, qui, dans une interview au quotidien La Stampa, a ébranlé l’omerta médiatique : « Nous avons des preuves flagrantes qu’il y a des contacts directs entre certaines ONG et les trafiquant­s d’êtres humains basés en Libye. Nous ne savons pas encore comment utiliser ces informatio­ns mais nous sommes assez certains de nos allégation­s. Des coups de fil qui partent de la Libye vers certaines ONG, des phares qui éclairent le chemin vers les bateaux de ces organisati­ons, des navires qui désactiven­t leur émetteur à l’improviste sont des faits avérés. »

Le procureur de la République pointe notamment du doigt L’ONG maltaise MOAS (Migrant Offshore Aid Station), fondée par un couple italo-américain d’« entreprene­urs humanitair­es » hyper-médiatique­s, Christophe­r et Regina Catrambone. Des photos publiées par le journal Times of Malta prouvent que, depuis des années, cette associatio­n sert de « taxi » aux migrants qui souhaitent rejoindre les côtes italiennes avant de poursuivre leur voyage vers le nord de l’europe. Pour le procureur, il ne s’agit pas d’action humanitair­e, mais de trafic d’êtres humains.

Bien qu’une enquête soit en cours, le président du Conseil italien Paolo Gentiloni a tenu à intervenir dans le débat pour féliciter en bloc les ONG et les services de l’état : « Je remercie les bénévoles, les garde-côtes et la marine qui sauvent des vies chaque jour. Nous, nous en sommes fiers. » Ce désaveu implicite n’a pas intimidé Zuccaro. Entendu le 3 mai par la commission de la Défense du Sénat, le procureur a apporté des preuves supplément­aires de ses assertions, en prenant soin de préciser qu’il ne visait pas toutes les ONG, mais seulement celles impliquées dans la collaborat­ion avec « tous ceux qui profitent de ce business, à commencer par les mafias ». Une déclaratio­n qui a choqué bien des grandes conscience­s. Souvent les mêmes qui accusent la mafia de s’être infiltrée dans tous les secteurs de la vie publique italienne. Partout, donc, sauf dans l’humanitair­e… •

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