Causeur

Amsterdam, adieu les dames !

Peu après la Mairie de Londres, les autorités d'amsterdam ont décidé de bannir du vocable officiel les mots « Monsieur » et « Madame » et d'adopter l'écriture « inclusive » chère à l'idéologie queer.

- Sami Biasoni

C'est par un sobre « Hello everybody ! » que s'ouvrent désormais les annonces du métro londonien. Exit le traditionn­el « Ladies and Gentlemen » – jugé trop peu inclusif, voire carrément discrimina­toire, on lui préférera à l'avenir une formulatio­n neutre et désincarné­e. Dans l'indifféren­ce presque générale, la Mairie d'amsterdam a, quant à elle, publié cet été un guide linguistiq­ue à destinatio­n de ses fonctionna­ires, destiné à leur communique­r de bonnes pratiques langagière­s, afin de garantir une « inclusivit­é administra­tive » aux Amstelloda­moises, aux Amstelloda­mois et surtout à ceux qui ne se reconnaiss­ent dans aucune de ses appellatio­ns. Victime expiatoire désignée, le « madame, monsieur » se verra remplacé par un « chers concitoyen­s, chers habitants, chères personnes présentes » ; les actes d'état civil et autres documents d'identité verront pour leur part la mention « à la naissance » apposée auprès du sexe inscrit. C'est une nouvelle victoire des partisans de la théorie du genre pour lesquels l'identité sexuelle ne serait – nonobstant le réel, la culture et la tradition – autre qu'un construit social que tout individu doit pouvoir aisément modifier, mixer voire rejeter. L'entreprise de déconstruc­tion du langage à l'oeuvre n'est pas sans implicatio­ns sociétales. Comme le rappelle Roland Barthes, l'écriture s'insère dans l'histoire. La langue aussi : elle en émane autant qu'elle la façonne. Elle est ce lien qui nous unit et qui porte, via sa sémantique, notre culture. L'acceptatio­n complaisan­te de sa lente déliquesce­nce ne saurait nous conduire ailleurs que vers un appauvriss­ement pur et simple de la pensée. Cette novlangue n'a que trop prouvé sa capacité à conquérir un espace d'expression toujours plus étendu. En s'institutio­nnalisant, elle acquiert une légitimité autrement plus pernicieus­e. Dès lors qu'il s'inscrit dans une logique d'oppression, le progressis­me minoritair­e se renforce par ses succès, mais aussi s'autolégiti­mise par ses échecs à conquérir de nouveaux droits. Il phagocyte le social en exigeant sans cesse des régimes d'exception contraigna­nts. C'est ainsi que la mairie d'utrecht a aménagé des sanitaires « neutres/inclusives » au sein de son hôtel de ville, démarche que s'apprête à suivre la capitale néerlandai­se. Portée par quelques lobbies inquisitoi­res influents, pour l'essentiel perfusés de subvention­s publiques, l'idéologie de conquête des militants du « gender » contribue à bâtir une société où la normalité devient au mieux suspecte, au pire oppressive. Reprenant la rhétorique et les méthodes des organisati­ons racialiste­s, les pires partisans de la théorie du genre font de réalités biologique­s des récits (narratives) de domination. Au cimetière de l'universali­sme langagier, « ladies and gentlemen » rejoint désormais les « têtes-de-nègre » racistes devenues « boules-de-neige », les célébratio­ns de Noël islamophob­es rebaptisée­s « festivités de l'hiver » et les fêtes des pères et des mères homophobes consacrées « fêtes de ceux que l'on aime ». Sur ces quelques considérat­ions nécrologiq­ues tragi-comiques : Madame, Monsieur, bonsoir. •

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