MANUEL D'HISTOIRE, SECOND DEGRÉ
Son Histoire de France de Cro-magnon à Emmanuel Macron est chronologique, véridique et néanmoins humoristique. Basile de Koch est donc l'antidote absolu à Patrick Boucheron et autres déconstructeurs du récit national.
Un jour, sans aucun doute, des philosophes en mal de thèse, d’éminents sociologues, de savants historiens se pencheront doctement sur l’aventure du groupe Jalons et la pensée de son président à vie autoproclamé Basile de Koch. Mais Dieu merci, ce moment n’est pas arrivé, et c’est en rabelaisien plutôt qu’en sorbonicole que l’on peut encore lire le susdit, et en particulier, goûter les sept joyes que procure son dernier opus, l’histoire de France de Cro-magnon à Emmanuel Macron. La première des sept est évidemment de s’esclaffer, à s’en tenir les côtes. Chacun de nous se remémore ce qu’il faisait lors des attentats du 11 septembre, de l’assassinat de Kennedy, ou, pour les plus âgés d’entre nous, de l’exécution de Louis XVI. Personnellement, je me rappelle aussi très précisément où je me trouvais lorsque j’eus pour la première fois entre les mains une production du groupe Jalons, L’aberration ; où j’étais, mais aussi la photo de une, le titre invraisemblable et le bleu pervenche du cartouche. Un tel rire ne s’oublie pas, surtout lorsqu’il se combine avec une telle incrédulité : comment est-ce possible ? La longue série des pastiches confirma que ça l’était, et que la vis comica était sans fin, comme aurait dit Alphonse Allais, arrière-grand-père putatif de monsieur de Koch. L’histoire de France qui vient de paraître ne fait pas exception à la règle, et manifeste la même virtuosité à jouer sur les mots, les idées, les références, les stéréotypes et les litotes – je recommande « Le relatif échec du Titanic » –, le tout dans un climat très politiquement incorrect. Résultat : des gags qui se succèdent à la cadence de la mitrailleuse, dont Basile de Koch rappelle opportunément qu’elle fut inventée par Leonardo, l’un des trois génies de la Renaissance avec les tortues ninjas Raffaello et Donatello. Parce que la première joye est de s’esclaffer, quel que soit le lieu où on lit cette Histoire, la deuxième est de s’expliquer – comme j’ai dû le faire lorsque, muni de l’ouvrage, me vint la fâcheuse idée d’y jeter un coup d’oeil dans le métro. L’oeil, à vrai dire, est d’abord aimanté par les titres typiquement de Kochiens (« Les Croisades, première tentative de dialogue Nord-sud »), puis par les illustrations hilarantes de Luc Cornillon, les petits exercices proposés aux lecteurs (« Dessine un vieux maréchal traître à sa patrie »), les résumés loufoques, etc. Difficile de s’en dépêtrer, et plus encore, de ne pas éclater de rire, après avoir vainement essuyé quelques larmes. D’où, dans une rame de métro un peu compassée, l’étonnement des voisins de strapontin, et l’obligation, afin de ne point paraître ridicule, de s’en expliquer. Et pour cela, de montrer l’objet du délit. D’où la troisième joye, qui est de partager : le voisin n’échappe pas à l’effet magnétique du livre, parcourt la première page, puis quelques autres, se demande à son tour comment on a pu oser, échange, discute, débat... Et du partage on passe, si ledit voisin a l’âge requis, à une quatrième joye. Basile de Koch a toujours raffolé des pastiches (sinon rien : ah ah ah !). Il en va de même