Causeur

Prostituti­on : la gamberge espagnole

- Par Gabriel Robin

À moins de 40 kilomètres de Perpignan, de nombreux Français s’encanaille­nt le samedi soir de l’autre côté des Pyrénées, à La Jonquera, un lieu de perdition glauque à peine illuminé par des néons. Ils y font le plein de cigarettes et d’alcool bon marché avant d’aller au bordel. Leurs réjouissan­ces vont-elles durer ? Avec le retour au pouvoir des socialiste­s espagnols, la question est posée. Il y a encore trois ans, le PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol) prévoyait d’abolir la prostituti­on jusqu’à présent tolérée par la loi. Retirée in extremis sous la pression populaire, cette mesure refait aujourd’hui surface dans un certain nombre de communes gérées par la gauche. En votant un édit qui pénalise la prostituti­on, la ville de Pinto, au sud de Madrid, a déclenché une polémique d’ampleur nationale. Au cours des débats municipaux de juin dernier, l’élue conservatr­ice d’opposition Rosa María Ganso a indigné la gauche par ces mots : « Il y a des personnes handicapée­s qui ont besoin de payer pour accéder à l'amour charnel. Il y a aussi des personnes qui naissent moches et qui n'ont pas la possibilit­é d'avoir des relations sexuelles sans recourir aux prostituée­s. Nous ne sommes pas tous blonds, charmants et beaux. » Cet argument houellebec­quien a valu un torrent d’injures à la quinquagén­aire devenue la cible de Podemos. Divisé entre libertaire­s défenseurs des travailleu­rs du sexe et féministes abolitionn­istes, le parti frère de La France insoumise a accusé Rosa María Ganso de défendre l’exploitati­on des femmes et de mépriser ses compatriot­es au physique disgracieu­x. Il a fallu la mise au point de la porte-parole du Parti populaire, Isabel Díaz Ayuso, pour que tout le monde sache que Ganso a un enfant handicapé. Las, Podemos ne l’a pas absoute de ses péchés. Un autre argument pourrait couper court au débat : 600 000 prostituée­s gagnent leur vie en chassant le mâle espagnol, dégageant 3,6 milliards d’euros par an. Grâce à ce marché juteux, la monarchie bourbonien­ne reste la championne d’europe du marché du sexe. Olé, olé ! •

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