Entre revenus du patrimoine et patrimoine, l'état a choisi.
Si la « flat tax » sur les placements financiers est un coup de pouce pour les actionnaires, elle s’avère être un coup de poing contre le patrimoine. Et il pourrait avoir du mal à s’en relever. Prenons l’exemple du propriétaire d’un monument historique (MH), qui perçoit par ailleurs 100 000 euros de dividendes par an. Il pouvait, en réinvestissant cette somme dans les travaux d’entretien de son domaine, la déduire de sa déclaration. Ce revenu n’était donc pas imposable et permettait de maintenir vivant un témoin de notre passé. Mais plus soucieux de production économique que de patrimoine historique, le gouvernement a décidé de taxer à hauteur de 30 % les dividendes, quelle que soit leur ampleur, en supprimant toutes les déductions fiscales. Notre actionnaire amoureux de vieilles pierres paiera donc 30 000 euros d’impôts, mais devra mettre de sa poche pour restaurer sa toiture classée. Une « aberration », pour Renaud de Châtillon, ancien membre du conseil général des Mines à Bercy (à l’origine de l’élaboration du texte), aujourd’hui retraité. En imaginant la première ébauche de cette loi, il ne pensait pas qu’elle serait remaniée au point de pénaliser les propriétaires de monuments historiques. « Il y avait jusquelà un fléchage de l'état disant “je choisis que votre argent aille en direction du patrimoine”, explique-t-il, cela encourageait à remettre un monument sur pied, c'était un contrat moral. Mais l'état dit maintenant “achetez des tickets de loto”. Tout le monde n'est pas joueur ! » Le problème est sérieux, car les propriétaires, qui ne sont pas tous milliardaires, devront supporter la charge de restaurations non défiscalisées tout en payant L’IFI (impôt sur la fortune immobilière). Le remplaçant de L’ISF ruinera la majorité d’entre eux tout en n’apportant que quelques millions dans les caisses de l’état. Un vrai gâchis quand on sait qu’un monument historique ouvert au public est souvent l’unique attrait touristique des petites communes. L’ancien haut fonctionnaire ne cache pas son amertume : « Après notre défaite industrielle, notre principale ressource en matière de commerce extérieur est le tourisme. Va-t-on le perdre aussi ? Car les propriétaires de monuments historiques sont de vrais acteurs économiques et culturels. Le grand projet d'emmanuel Macron est de restaurer le château de Villers-cotterêts. Coût estimé : 150 millions d'euros. Le président veut imposer sa marque en rénovant un château, c'est très bien. Mais cela se fera au détriment de la rénovation de tous les autres. » On se demande si Macron, qui s’emploie à populariser le patrimoine, ne va pas surtout le paupériser. •