LUCIEN À AUSTERLITZ
Pire que mon ami Fabrice à Waterloo ! Impossible de m'y retrouver, ce mois-ci, dans le tumulte des affaires Collomb, Fogiel, Banksy, Mélenchon… Mais qu'importe ! Sur Austerlitz, c'est-à-dire à la Bibliothèque nationale, le Soleil de la reconnaissance officielle se lève enfin sur Jalons. Après ça, vous pouvez mourir.
JALONS AU PANTHÉON DES LETTRES Dimanche 30 septembre
Désolé Bernard, je n’ai pas pu me libérer pour le vernissage de ton expo Basquiat-schiele. Ma famille et moi, on était à un truc concurrent : l’exposition « Les pastiches de Jalons » à la BNF. Mets-toi à ma place : Basquiat, et même Schiele, c’est pas nouveau. Alors que la reconnaissance de notre oeuvre par la Bibliothèque nationale en personne, même moi je ne m’y attendais pas. J’espérais, au mieux, une thèse d’universitaire québécois.
LE CONTINENT DÉCOUVERT PAR COLLOMB Mercredi 3 octobre
En politique, depuis une dizaine de jours, nous vivons dans le brouillard et le brouhaha. (Heureusement qu’on n’y vit pas vraiment.) L’« infox continue » tourne en rond autour de sujets aussi vains que le jugement moral à porter éventuellement sur la démission de Collomb, ou la signification cachée de la difficulté que semble éprouver Macron à le remplacer. WTF ! Dans cette « séquence », comme disent les journalistes, l’essentiel est ailleurs : dans les deux minutes d’un testament politique glaçant, au milieu d’une passation de pouvoirs glaciale entre Collomb et Philippe. Pourquoi les médias ont-ils préféré focaliser sur la comédie politicienne ? Va savoir. Pour ma part, il me semble plus utile de rappeler ces quelques phrases qui, au-delà de l’écume et de la vague, annoncent le tsunami : « Si j’ai un message à faire passer, je suis allé dans tous ces quartiers […]. La situation y est très dégradée, et le terme de “reconquête républicaine” prend tout son sens. Parce que dans ces quartiers, c’est plutôt la loi du plus fort qui s’impose : celle des narcotrafiquants, des islamistes radicaux, qui a pris la place de la loi de la République. […] Aujourd’hui, on vit côte à côte, et je crains que demain, on puisse vivre face à face. » M’est avis que Gérard redit ici à Emmanuel, pour la première fois en public, ce qu’il n’a pas dû manquer de lui dire en privé au cours des semaines passées : « Si je me retire sur mon Aventin lyonnais, c’est aussi parce que l’affaire dépasse les compétences d’un ministre – fût-ce moi. Quand c’est la guerre civile qui menace, au chef de l’état de prendre ses responsabilités ! » Hélas, il y a deux ans déjà, au lieu d’agir, un précédent président qui n’aurait pas dû dire ça confiait à Davet et Lhomme : « C’est ça qui est en train de se produire : la partition. » Autrement dit, l’affaire est si grave qu’elle semble dépasser même les compétences du président de la République. Alors, on danse ?
ALEXANDRE VI BORGIA, SANTO SUBITO ! Dimanche 14 octobre
Après Jean-paul II et Jean XXIII, allons-y pour Paul VI, en attendant Benoît, François et les autres… C’est quoi cette nouvelle mode, en passe de devenir une règle, comme quoi il suffirait d’avoir été pape (surtout depuis le Concile) pour être déclaré saint ? Attention les amis, tout ça finira comme la Légion d’honneur…
ARS GRATIA ARTIS Mercredi 17 octobre
À l’instant même où elle était adjugée au prix de 1,2
million euros, La Fille au ballon de Banksy a été en partie détruite par un broyeur, préalablement intégré dans le cadre par l’artiste. Qu’à cela ne tienne ! L’acheteuse a confirmé son acquisition de l’oeuvre, rebaptisée pour la circonstance L’amour est dans la poubelle. Par ce geste, le roi du street art entendait, on l’aura deviné, dénoncer la « marchandisation de l’art ». Résultat : le prix de l’oeuvre a doublé depuis son laminage. Pourtant, aux dernières nouvelles, Banksy n’est pas content. Dans une vidéo postée aujourd’hui sur Youtube, il révèle que la toile aurait dû être déchiquetée intégralement. « Ça avait marché aux répétitions », se plaint-il, images à l’appui. De fait, c’est ballot : si ça se trouve, entièrement broyée, l’oeuvre aurait valu quatre fois plus.
GPA À LA LA LAND Samedi 20 octobre
Décidément, le lobby homophobe n’est plus ce qu’il était. Invité dans tous les médias aux heures de grande écoute, Marc-olivier Fogiel a pu délivrer à la ville et au monde son courageux message en faveur de la GPA. Depuis le début du mois, l’animateur est en promo pour un « récit intime » au titre pamphlétaire, Qu’estce qu’elle a ma famille ? À quelle agression répond donc cette apostrophe ? Mystère et boule d’ovules ! Le grand public ignorait tout de ladite famille, jusqu’à ce que Marco l’étale dans Match. Bref, chez lui, visiblement, tout baigne : deux papas et deux fillettes heureux – plus deux dames, une donneuse et une porteuse, également ravies. L’affaire PMA étant dans le sac, M.-O. F. a dû estimer le moment propice pour ce « Gpaing out ». Ainsi restera-t-il dans l’histoire comme le premier à avoir posé un jalon vers cette prochaine cime à atteindre dans l’escalade infinie du mont Progrès. Ce samedi, donc, Fogiel est l’« invité politique » de son ami Ruquier dans « On n’est pas couché ». À ce titre, il peut s’exprimer pendant une heure vingt, contre vingt minutes en moyenne pour les autres invités. Mais surtout, cette qualité suffit à montrer que son « récit intime » est un manifeste. D’ailleurs, pour soutenir Marco dans sa juste lutte, Lolo a sorti le grand jeu en conviant à ses côtés, entre autres, Muriel Robin et Jean-paul Gaultier. « Un plateau plutôt gay friendly ! » euphémise l’animateur, tandis qu’élie Semoun propose poliment de repasser une autre fois. Par bonheur, être gay n’est pas plus une opinion qu’un choix, et Charles Consigny le montre avec panache. Seul contre la meute Ruquier-fogielrobin, qui semble s’être réparti les rôles : l’« invité politique » interrompt systématiquement les questions, l’invitée show-biz insulte le questionneur, et l’hôte empêche celui-ci de répondre. Y a pas à dire, c’est bien foutu.
VOILE ISLAMIQUE ET VAPEURS ONUSIENNES Mardi 23 octobre
Le comité des droits de l’homme de L’ONU condamne la France pour « ingérence étatique dans la liberté religieuse des musulmanes portant le voile intégral ». L’ONU a raison : tout le monde a le droit de vivre sa religion à visage découvert.
NOTES SUR MANCHETTES
– Autrefois, je croyais en Dieu. Aujourd’hui, je ne crois plus qu’en Dieu. (Gustave Thibon) – Il m’arrive de faire des nuits blanches, mais c’est exceptionnel. En général, c’est le contrecoup de la précédente. – « J’adore les scarabées, mais c’est difficile à éplucher ». (Confidence d’alfred Jarry à Jules Renard) – Revu « Faciales », sur Redtube. Assez surfait, finalement. – « Ôtez le surnaturel, il ne reste que ce qui n’est pas naturel. » (Chesterton) – Mon verre est petit, mais je bois au goulot. – (De son vieux curé à Malraux :) « Le secret de tout, c’est qu’il n’y a pas de grande personne. »