Causeur

Organique ta Nana !

- Par Daoud Boughezala

Jadis, les femmes vivaient à l’abri du péché, des fluides et autres désordres intestinau­x. L’horloge biologique avait beau tourner, les publicités pour protection­s hygiénique­s substituai­ent au sang un sobre liquide bleu. À l’ère de la transparen­ce et de #metoo, ce genre d’artifice n’est plus de saison. Ainsi, depuis la rentrée, la nouvelle pub pour les serviettes hygiénique­s Nana, élégamment intitulée « Viva la vulva », montre un spectacle des plus crus. Sur Youtube, la marque donne le ton : « Une femme sur deux pense que sa vulve n’est pas parfaite. Nature, rasée, petite, grande, claire, foncée, sensible… il n’y a qu’une seule vulve parfaite, la vôtre ! Prenez soin de votre vulve à votre façon et découvrez la gamme Nana Puresensit­ive™. » Sur ces images diffusées aux heures de grande écoute, des jeunes femmes tiennent entre leurs jambes une pêche ou un coquillage, une serviette souillée de sang se met à parler, une jeune femme s’ausculte l’entrejambe avec un miroir de voyage… Résultat : le CSA aurait reçu un millier de signalemen­ts de téléspecta­teurs indignés par tant de poésie. Une pétition réclamant son retrait des écrans a même recueilli 16 000 signatures. Signe des temps, la marque bio Naturalia applique grosso vulvo la même stratégie marketing que sa concurrent­e. Sur les affiches de promotion de ses serviettes périodique­s, on peut lire : « On ne met pas de glyphosate dans nos abricots. Ce n’est pas pour en mettre dans le vôtre. » Même chose avec les amandes, les prunes et les figues. Au cas où on n’aurait pas compris, l’un des visuels annonce : « Si vous chassez les OGM de votre frigo, ce n’est pas pour les retrouver dans votre culotte. » Interrogée par Le Parisien, la directrice de l’enseigne écolo dit vouloir « bousculer les habitudes et les mentalités », sans craindre de « lever un tabou ». Sur l’échelle de l’intersecti­onnalité, Nana et Naturalia semblent néanmoins petit bras. Obstinémen­t genrées, leurs pubs ne s’adressent qu’aux femmes. Outremanch­e, les associatio­ns de transgenre­s nées femmes ont obtenu de la marque de serviettes Always le retrait du symbole Vénus de ses emballages. Le bio c’est bon, mais pas avec n’importe qui. •

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