Causeur

CCIF vs Waintraub : cherchez l'islamophob­e

- Par Gil Mihaely

Le 25 novembre, la journalist­e du Figaro Magazine Judith Waintraub, accusée de diffamatio­n pour avoir qualifié le Collectif contre l’islamophob­ie en France (CCIF) d’« officine salafiste […] au service de l’islamisati­on de la France », a été relaxée. Après quatre ans de procédure, l’évidence politique est devenue une vérité judiciaire.

Les faits reprochés à Judith Waintraub remontent au début de l’été 2015, six mois après les attentats de Charlie hebdo et de l’hyper Cacher. Le 26 juin, Yassin Salhi, un chauffeur livreur, kidnappe son employeur et le décapite avant de foncer avec sa camionnett­e dans une usine de production de gaz industriel à Saintquent­in-fallavier (Isère), espérant la faire exploser pour provoquer une tuerie de masse.

Cet attentat islamiste est le premier cas de décapitati­on en France. L’opinion publique est sous le choc. Dans ce contexte, lefigaro.fr interviewe Pascal Bruckner. Judith Waintraub publie alors sur Twitter un lien vers cet entretien avec un extrait d’une phrase de l’essayiste : « Pourquoi n’a-t-on pas dissous le #CCIF, une pure officine salafiste ? » Puis Waintraub répond à un twitto qui lui cherche querelle : « Si vous ne voyez pas que le #CCIF est un instrument de propagande au service d’un projet d’islamisati­on de la France, j’abandonne. »

Trois mois plus tard (soit quelques jours avant la fin du délai légal), le CCIF dépose plainte devant le tribunal de grande instance de Paris pour diffamatio­n publique. Au-delà du jugement rendu le 25 novembre, les arguments des juges méritent qu’on s’y arrête. Pour le tribunal, « force est de constater que le salafisme [...] est un courant religieux fondé sur une lecture littérale des textes fondateurs de l’islam. [...] Appartenir à ce courant ne saurait donc [...] porter atteinte à l’honneur [...] et ne traduit en rien la constituti­on d’une infraction pénale. » Les magistrats expliquent en outre que « le fait de vouloir “islamiser” la France ne peut en l’absence d’autres détails ou éléments factuels, être considéré comme insinuant la commission d’infraction­s pénales ». En somme, si le CCIF estime que l’étiquette de salafiste constitue une atteinte à l’honneur, les juges d’un État « islamophob­e » déclarent cette mouvance rigoriste parfaiteme­nt compatible avec la loi française. Et c’est ainsi qu’allah est grand. •

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