L'art de moraliser vertement
La FIAC a organisé, du 18 au 20 octobre dernier, des débats sur l’art contemporain. Les thématiques principales de ces « conversations rooms » ont été l’écologie, l’environnement, la protection des océans, la question migratoire et la décolonisation des arts (six débats sur neuf). L’un d’eux, animé par Laure Adler, journaliste à France Inter, associait Hans-ulrich Obrist, responsable de la Fondation Cartier, et Fabrice Hyber, enfant chéri des centres d’art français.
« L’art doit être le cri de toutes les urgences ! » déclare d’entrée de jeu Hans-ulrich Obrist. Cela signifie, comprend-on vite, que l’art doit se mettre au service des belles causes contemporaines et c’est à cela que s’exerce le talent de ce curateur. En particulier, la Fondation Cartier présente jusqu’au 5 janvier 2020 l’exposition « Nous les arbres », intéressante au demeurant (on y voit notamment d’époustouflantes peintures de Luiz Zerbini). Les organisateurs affichent dès l’entrée leur dévotion naïve pour les arbres qui, croient-ils, « comptent parmi les plus anciens êtres vivants de la planète ». Le parcours tout uniment « met en lumière la beauté et la richesse des arbres aujourd’hui menacés ». Cependant, cette vision irénique d’une forêt par essence positive est-elle raisonnable dans un pays où elle ne cesse de progresser, envahissant et stérilisant le milieu rural ?
Plus surprenant, Fabrice Hyber, protagoniste de ce débat à la FIAC et de l’exposition « Nous les arbres », « achète des paysages » en Vendée pour les transformer en forêt. Cet artiste est pourtant fils d’un petit agriculteur, éleveur de moutons dans cette région. On aurait pu attendre de lui qu’il ait plus de compassion pour le monde paysan et surtout qu’il comprenne cette chose simple : la croissance forestière diminue la surface agricole. En plantant sa forêt, il supprime, sans même s’en rendre compte, la possibilité d’existence d’une ou plusieurs exploitations familiales comme celle qui lui a permis de grandir.
On le voit, en se raccrochant à des thèmes d’actualité, les artistes et les curateurs peuvent, certes, s’inscrire puissamment dans le présent. Cependant, ils prennent aussi le risque de chercher un succès facile et de tomber dans les idées reçues.