« Nous devons nous défendre »
Entretien avec Raphaël Gauvain, avocat et député LREM, auteur d'un rapport sur la protection des entreprises contre les lois et mesures à portée extraterritoriale, remis au Premier ministre en juin 2019. Causeur. Que pensez-vous de la libération de Jean Boustani ? Raphaël Gauvain.
C’est l’exception et non le cas d’espèce. Il est fort rare qu’un prévenu soit innocenté dans ce genre de dossiers, où la justice américaine applique l’extraterritorialité du droit américain.
Est-ce à dire que les tribunaux américains sont aux ordres ?
Pas du tout, car dans l’immense majorité des cas, les firmes incriminées transigent avec le DOJ, ce qui fait que le contentieux n’arrive jamais devant un tribunal indépendant. Les lois extraterritoriales sont instrumentalisées. Les poursuites vont souvent dans le sens des intérêts économiques américains.
Pourquoi accepter de négocier avec le département de la Justice, dès lors qu'aucune infraction n'a été commise sur le sol américain ?
Tout simplement parce que les États-unis appliquent des mesures de rétorsion dès que les accusations sont formulées, sans attendre un jugement. Le DOJ lance une procédure, il fait arrêter des cadres, y compris à l’étranger, et immédiatement le gouvernement décrète des sanctions. Les entreprises qui veulent continuer à travailler là-bas, ou qui recourent à des sociétés américaines, sont obligées de négocier.
Que faire ?
On ne peut pas attendre que le système américain change. La France et l’union européenne doivent se défendre et protéger leurs entreprises. Je fais des propositions en ce sens. C’est un sujet technique, mais de première importance. •