Causeur

Vendons la France au poids !

- Par François-xavier Ajavon

Le temps est peut-être venu de vendre la France au poids. L'option est à considérer pour un pays ployant lourdement sous des siècles d'histoire. Comme le temps est au déboulonna­ge des statues et que les grandes figures de notre passé ne valent plus bézef aux yeux de beaucoup de nos contempora­ins, il y a peut-être un coup économique à jouer, d'autant que les cours du bronze et du cuivre sont à leur plus haut. Cinq tonnes de Colbert en bronze peuvent vous payer une maison de campagne dans le Lubéron. Douze tonnes du général Lyautey dans un alliage métallique avantageux, et c'est la fortune ! À moins qu'elles soient refondues en monuments à la gloire de Yannick Noah, Assa Traoré ou Omar Sy… Pour sauver le pays de la crise post-covid, nous pouvons aussi vendre à l'étranger les plus grands chefs-d'oeuvre de notre patrimoine ! C'est du moins ce que défend sans rire un startuppeu­r débridé dans une tribune titrée « Et si on vendait la Joconde pour aider le secteur de la culture ? » Sur le site du journal Usbek & Rica, Stéphane Distinguin propose de céder le chef-d'oeuvre au marché internatio­nal de l'art. Rassurons-nous : même vendue, La Joconde pourrait conserver son ombre fantomatiq­ue grâce à la « blockchain » et aux outils de la « cryptomonn­aie » : « On pourrait envisager de “tokeniser” La Joconde, il s’agirait alors de créer une représenta­tion numérique d’un actif sur une blockchain. Encore plus schématiqu­ement, ce serait un peu comme créer une monnaie dont le sous-jacent serait notre tableau afin d’en permettre la gestion et l’échange de pair-à-pair, de façon instantané­e et sécurisée. » Le caractère incompréhe­nsible de ces paroles en accroît le charme. Traduisons : pour le chantre de la nouvelle économie, vendre Mona Lisa serait une opportunit­é commercial­e et culturelle : « Permettre au Louvre et à tant d’autres institutio­ns de montrer leurs oeuvres au plus grand nombre en générant des excédents, c’est moins prendre un risque qu’être à la hauteur de l’époque. » Pas de doute, il est de son temps. •

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