Pendant le confinement, la boulimie sexuelle a surtout frappé les célibataires coincés en solo chez eux
nication, ma présence sur les réseaux sociaux et les sites, mais je n’ai reçu aucun client. Financièrement, c’est dur, même si je ne pense pas avoir perdu mon temps. » La branche, de plus en plus concurrentielle, a tenté de survivre à l'aide de la webcam et de scénarios de soumission adaptés aux circonstances. Là aussi, le virtuel a montré avec évidence ses failles et ses limites. « C’était délicat pour les clients confinés avec des familles », reconnaît Maîtresse Gladys, évoquant l'aspect logistique de l'exercice. La perspective d'arborer un collier clouté devant ses enfants pouvait dissuader les pratiquants les plus fervents, les spécificités psychologiques de la discipline rendaient d'autres plus méfiants encore : « Les soumis ont besoin de connaître la personnalité de leur dominatrice et à distance, cela ne fonctionne pas. Après tout, je vends mon emprise sur l’autre. Pour que les gens s’abandonnent, ils doivent avoir une confiance totale. » Une confiance revenue dès la levée du confinement, en dépit des risques de contamination. « J’ai un habitué âgé qui est venu en séance avec un masque pour aussitôt l’enlever sans la moindre inquiétude. Il n’y a pas d’échange de fluides en soumission, alors ça rassure », détaille Maîtresse Gladys. Son sens de la responsabilité lui a fait adopter des règles d'hygiène strictes bien avant que la pandémie ne pousse les Français à dévaliser le rayon savon des supermarchés.
Ces précautions n'aident pas à faire revivre la grande fête charnelle. « Peu évident », admet Martin dépité, soulignant la frilosité des organisateurs de soirées privées et accusant avec peine la fermeture des boîtes de nuit jusqu'à septembre. « La fête de la musique a été un excellent révélateur de la fougue des jeunes. Les gens sont en attente, prêts à saisir toute occasion pour s’amuser et draguer », peste-t-il, convaincu que les habitués de la bringue dénudée ne songent qu'à revenir au Cap d'agde. Plus que l'apparition hypothétique d'un cluster sur les plages réservées aux naturistes, il faut redouter selon lui les retards des trains, le trafic aérien incertain et les difficultés à se loger. Une réticence qui a pourtant peu de chances de profiter de nouveau à Youporn ou aux sites de rencontres, tant l'emballement qu'ils ont provoqué, comme par surprise, semble épuisé. Pendant le confinement, estime Martin, la boulimie sexuelle a surtout frappé les célibataires coincés en solo chez eux – ce fut le cas de 27 % des Français. Mais plus personne ne semble prêt à se satisfaire de plaisirs solitaires devant l'écran. Le sexe et l'amour restent encore largement une affaire de peau, de regards et de contacts charnels. Au moins une part de la vie que le numérique n'aura pas. •