Si nous n'acceptons pas que nos militaires interviennent, nous aurons les milices ou les pillards
On sait aussi le succès mérité des deux livres du général Pierre de Villiers : la France sent, confusément mais intensément, qu'elle a besoin qu'infusent dans toute la société le pragmatisme et l'éthique exigeante des armées. Cette attente populaire est une force.
Autre atout de nos armées : une longue et belle tradition d'intégration républicaine. À l'heure où certains accusent la France de « racisme systémique » alors qu'eux-mêmes promeuvent une vision racialiste du monde, les armées sont un modèle à valoriser. Sous le feu, seuls comptent la loyauté et le courage, la couleur de peau n'est rien : ni les balles ennemies ni la fraternité d'armes ne s'arrêtent à une différence aussi superficielle.
Faut-il donc déployer l'armée dans les zones de nondroit et autres quartiers de reconquête républicaine ? Oui. Non pour « envoyer les chars », mais pour nous appuyer sur l'expérience et le savoir-faire remarquables de nos troupes, dont nous aurons bien besoin pour rétablir l'ordre sur le territoire national. À Nîmes, une école a dû être « délocalisée », dit pudiquement la mairie, en raison de l'utilisation d'armes de guerre par des bandes rivales dans le quartier où elle se trouvait. En France, en 2020, des enfants doivent fuir des zones livrées aux affrontements armés pour pouvoir suivre leur scolarité. Et on se pose encore la question de l'état de siège ? Dijon en est la preuve : si nous n'acceptons pas que nos militaires interviennent, nous aurons les milices ou les pillards.
Et plutôt que des milices populaires, dont la bonne volonté gorgée d'exaspération risque hélas de dégénérer, nous devrions exiger la mise en place d'une véritable garde nationale, volontaires encadrés par des professionnels. Ainsi, nous disposerions des effectifs nécessaires pour tenir l'ensemble du territoire. Ainsi, ceux qui brûlent d'agir pourraient le faire sans risque de récupération par des groupes factieux ou extrémistes. Ainsi, un plus grand nombre de citoyens verraient de leurs yeux la réalité de la menace, et pourraient relayer un constat factuel face aux absurdités idéologiques. Ainsi, les forces de l'ordre et les forces armées ne risqueraient plus de se croire abandonnées du reste de la Nation, mais se sauraient soutenues, conscientes que c'est de ce soutien qu'elles tirent leur légitimité.
Un rêve : que tous les élus, magistrats, avocats, journalistes aient l'obligation, au moins une nuit par mois, de patrouiller avec les forces de l'ordre dans un quartier sensible. Anonymement, pour ne pas fausser l'expérience. Sans sécurité supplémentaire, dans les conditions qui sont au quotidien celles des policiers, des gendarmes, des soldats. Gageons que très vite le discours médiatique changera. Gageons que l'impunité prendra fin pour les délinquants.
Ces changements sont des prérequis indispensables : aucune police, aucune armée au monde ne peut sauver un peuple qui a décidé de se suicider et d'applaudir la disparition de sa propre civilisation. Trahison ignoble de quelques générations d'enfants gâtés capricieux qui privent leurs successeurs de ce que leurs prédécesseurs ont consacré des millénaires à bâtir.
Il ne servirait à rien de demander aux armées de reconquérir les parcelles perdues du territoire national, si c'est pour les brider comme on bride aujourd'hui la police et la gendarmerie. Jusqu'ici, tous les projets de simplification de la procédure pénale ont été des échecs retentissants. Il faut lire David Galula et son remarquable traité de contreinsurrection. Les sanctions doivent être immédiates et identiques sur tout le territoire. Les brutes qui font régner leur loi dans certaines zones doivent en être écartées dès qu'elles sont identifiées, afin d'en protéger le voisinage. Les quartiers calmes (notamment ayant un taux élevé de population d'origine étrangère) doivent bénéficier des politiques publiques en priorité par rapport à ceux qui se distinguent par les violences urbaines et les trafics : le respect des lois doit être récompensé. De même, il est urgent d'allouer plus de moyens aux bourses d'études ou au soutien scolaire à destination des adolescents et jeunes adultes sans histoire, plutôt qu'à une « réinsertion » qui revient à offrir à des délinquants ce que d'autres, honnêtes, n'auront jamais. Les ressources doivent être concentrées sur les services publics dirigés par des personnes fiables, et non données à des associations à la loyauté douteuse sur lesquelles l'état se décharge de ses responsabilités. Ce sont là des conditions indispensables de la victoire, avec la proclamation de l'état de siège au moins le temps de désarmer les « quartiers » et d'enfermer les chefs de bandes. La France et la République ne seront respectées que si elles savent se faire respecter.
C'est la leçon d'ibn Khaldoun : pour ne pas tomber dans la spirale de la violence, nous devrons redonner son sens et sa noblesse à l'usage de la force. En clair, si tu veux la paix, prépare la guerre. • 1.
Deux femmes gendarmes avaient été abattues en juin 2012 au cours d'un cambriolage dans cette commune du Var.