Lionne au Cameroun
En direct du… Faro
Mon hôte russe avait déjà à son actif quelques lions obtenus essentiellement à l’appât en Afrique australe. Il souhaitait cette fois-ci le chasser exclusivement au pistage. Ce fut son second essai sur nos terres du Faro au Cameroun.
Ce matin-là, le pied puissant du seigneur des savanes estampille les méandres de la piste poussiéreuse. Il nous sort de notre léthargie, éveille nos espérances et accélère nos palpitations. Nous le traquons deux bons kilomètres quand, soudain, l’empreinte oblique à travers la brousse. Le pistage s’en trouve ralenti. D’un travail d’orfèvre, nous disséquons méticuleusement le moindre indice qui nous permette de confirmer l’itinéraire du fauve : une esquisse de paume, une feuille dépoussiérée, un reflet de lumière plus contrasté sur la terre foulée… Nous réalisons au cours de notre lente pérégrination qu’une autre marque, celui d’un sabot d’hippotrague, semble captiver notre lion. Ce qui facilite notre progression. La carte du sol nous dévoile subitement que le prédateur a pris son élan, ses serres plantées dans l’épiderme terreux. La fourchette du sabot de sa proie s’écarte, signant un démarrage effréné. Plus en avant, la perforation du terrain par les quatre sabots de l’antilope confirme que le félidé s’agrippe à son dos. Bientôt une traînée du membre antérieur gauche du bovidé démontre que le lion a glissé et s’accroche à sa jambe.
Puis surviennent les indices de la lutte finale… La masse d’environ 300 kilos s’est affalée, s’est débattue puis figée. Quelques gouttes de sang échappées du cou expliquent la strangulation. Le félin a eu raison de lui. Il s’est reposé quelques instants à côté de sa ripaille. Le large sillon qui s’ensuit témoigne de la recherche d’un couvert pour abriter son festin.
Soudain un mouvement, une masse à soixante mètres capte mon attention. Je le découvre noble et circonspect, dressé derrière le corps de la roanne. Il nous épie. Il hésite entre fuir et défendre son déjeuner. Il est puissant et d’un bel âge. Je fais signe à Igor de le mettre en joue. Il se défile à cet instant. Igor, chasseur chevronné, le poursuit dans son optique. Le roi a eu la curiosité de s’arrêter et de se retourner. Igor presse la queue de détente. Le lion bondit, rugit, s’affale. Alena, l’amie d’igor, filme toute la scène. Quelle chasse! Une montée d’adrénaline en douceur pour atteindre son paroxysme à ce moment. La puissance de l’émotion boostée par une traque sans précédent. Nous prélevons un seul quota par an dans les règles de l’art. Jamais à la rencontre ni à l’appât. Perpétuant ainsi l’authenticité du pistage au lion, l’un des challenges les plus difficiles qui soient. ■