Bernard de Grunne
Cette fenêtre éclaire nos journées avec plus ou moins de fréquence et d’intensité. Celle de vos tablette, smartphone, PC, Mac. Certains la rejettent par paresse et surtout par principe. Un livre n’est pas forcément bon parce que c’est un livre si l’on voulait simplifier. Eh bien, l’intérêt de ce petit écran dépend de vos recherches croisées. Je vous engage à jeter un oeil sur ces petits films qui vont rarement au-delà de deux minutes et demie sur le site de ce galeriste bruxellois. Ils peuvent être un premier pas vers l’art tribal africain, océanien, indonésien ou répondre à vos recherches de collectionneur. Bernard de Grunne y expose un peu d’histoire, d’ethnologie, de géographie. Il y explique aussi l’origine des matières, des patines, des couleurs de ces objets, leur usage rituel utilisé, dansé, vénéré. Ils sont masques ou statues complètement anonymes, c’est le propre de cet art, et proviennent essentiellement d’afrique de l’ouest et d’afrique centrale.
Bernard de Grunne a choisi le feutre de sa voix et ses aptitudes naturelles pour dessiner un parcours singulier. « Je suis venu à mon métier par hasard. Je n’avais pas la bosse de la chimie, ni celle de la physique. De la biologie, je suis passé à l’archéologie classique et à l’histoire de l’art à Louvain. En licence, j’avais opté pour une spécialité en art africain. » Pas totalement par hasard. Un père grand collectionneur d’art africain, son intérêt très jeune pour ce type d’acquisition et, vers 1617 ans, sa décision d’en faire sa spécialité. Après son doctorat et une fois à l’université de Yale aux États-unis, il rencontre un professeur brillantissime. Quand son père en a assez de payer ses études, il travaille dans une banque et, après six mois, en 1987, Sotheby’s l’approche afin de prendre la direction du département d’art africain et indien d’amérique. Un an après, celui de Londres. « J’ai donc géré les deux pendant cinq ans. En 1992, j’ai voulu faire autre chose chez un très bel éditeur de presse informatique Ziff Davis Publishing dont le propriétaire, William Ziff, était collectionneur d’art tribal. » En 1995, il revient en Belgique et ouvre une galerie aux Sablons. Il est aujourd’hui marchand, spécialiste d’art classique africain et océanien. Mais on ne se débarrasse pas comme cela d’une formation universitaire. « J’ai une passion pour la recherche. Je publie, j’organise des expositions. Je conseille des collectionneurs américains et européens et les guide dans leur choix en leur montrant ce qui existe et où se situe l’objet qu’ils veulent acheter dans ce corpus. Les collectionneurs aiment beaucoup cela. »
Le marché africain demeure secondaire. Une bonne année s’établit entre 100 et 200 millions d’euros, le prix de deux tableaux importants d’art contemporain, moderne. Ce n’est pas un marché de spéculateurs mais de passion pour l’art africain, océanien, indonésien. Les objets sont sortis entre le début de la colonisation en 1880 et les années 1970. Ils ont eu trois à cinq propriétaires. La tendance est à mélanger l’art africain avec du design, du mobilier du XXE siècle avec des objets d’autres cultures. « Le cubisme a déclenché, vers 1905-1907 grâce à Picasso et Braque, l’attrait pour la sculpture tribale africaine et océanienne. L’art du XXE est sorti de cette rencontre. L’exposition Primitivisme dans l’art du XXE siècle
présentée par William Rubin en 1984 au MOMA à New York avait démontré ces parallèles entre les grandes créations du XXE et l’art non européen. » Les expositions Forêts natales et Picasso Primitif au musée du Quai Branly menées par Yves Le Fur, son conservateur général, ont magnifiquement mis en lumière cette forme d’art en 2017. L’activité mondiale s’est figée cette année, les salons ont été ajournés. Néanmoins Bernard de Grunne était bien présent à Paris dans le VIE lors du Parcours des mondes, le salon international dédié à l’art traditionnel d’afrique, d’asie, d’océanie et des Amériques et d’archéologie. Il le sera aussi à la Tefaf de Maastricht, comme depuis vingt ans, qui a été décalé à mai. En attendant, son activité se poursuit grâce aux nouveaux moyens de communication. Il réfléchit à deuxtrois projets de catalogue et entend organiser des minisalons, dans sa galerie de l’avenue Franklin-roosevelt à Bruxelles. La capitale belge n’est finalement qu’à une heure et demie de Paris.
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