Chasses Internationales

Gérard Pasanisi

- Nicolas Dubich

Les grands hommes ne s’en vont jamais. Nous étions ma femme et moi, accompagné de notre fils, au zoo, assis sur un banc devant les éléphants qui me tiennent tant à coeur. Je les regardais fixement comme hypnotisé. Mon portable sonna qui vint interrompr­e ce moment de plénitude, ce coup de téléphone qu’on espère jamais avoir. Éric, votre fils, m’annonçait votre départ. Pourquoi étaisje devant les éléphants? Dans ces cas-là, je ne crois pas au hasard. J’étais là pour vous. Éric et moi avons échangé que très peu de mots. J’ai quitté les lieux les yeux brillants, mon fils dans les bras, et me suis retourné. J’ai lancé un dernier regard derrière moi vers ces pachyderme­s qui ont tellement empli votre vie. Je savais que la grande aventure de ma vie s’arrêtait là, une page se tournait, définitive­ment.

S’il y a une personne dont je pensais qu’elle ne partirait jamais, c’était bien vous. Vous avez tellement oeuvré pour la conservati­on de la faune, tellement défendu les intérêts de la chasse en Tanzanie. C’est grâce à vous que j’ai pu vivre tout cela. Une aventure humaine qui a duré vingt-deux années.

J’ai un souvenir qui me revient. En mai 1998, un projet de loi devait être voté au Parlement afin de mettre un terme à la grande chasse en Tanzanie. Vous vous êtes battus pendant des mois pour vous faire entendre. J’étais seul au bureau, nous attendions les résultats. Vers 14 heures, vous avez pénétré dans l’enceinte du bureau à bord de votre véhicule. Le garage était désert, je vous regarde sortir de votre voiture, vous étiez seul avec vous-même vous leviez les bras en signe de victoire…

Je n’oublierai jamais votre regard, si déterminé, si puissant et rassurant en même temps. Vous étiez l’homme de toutes les situations. Ce jour-là, j’avais été pris d’une montée d’adrénaline d’une intensité rare. Sans pudeur, je peux vous dire la fierté immense d’avoir travaillé pour vous, avec le sentiment de faire partie d’une grande famille. Le jour de votre départ, je suis sûr que les derniers éléphants d’afrique ont barri en regardant le soleil disparaîtr­e derrière les montagnes du Mbaragundu. Les grands hommes ne s’en vont jamais. Très affectueus­ement. ■

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Cher Gérard,

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