Et la condition humaine ?
Que pensez-vous du RIP et des décisions de Barbara Pompili ?
Je pense qu’un référendum, aussi démocratique qu’il soit, ne peut pas résumer aussi facilement les positions à adopter en matière de condition animale. Parfois je me dis qu’on se trompe de combat. C’est un syndrome très français. Ce référendum fait un vrai amalgame entre les notions de défense des animaux, d’élevage et d’agriculture intensifs, de droits des animaux et de protection des espèces. Si l’on observe le sujet de la détention d’animaux sauvages, il faut pouvoir amener un peu moins de sentiment dans tout cela. Je suis un homme de cirque traditionnel et un homme de cheval et, pour moi, ces animaux, nés en captivité, font partie de notre patrimoine vivant. Il nous appartient de les soigner et de les respecter dans la dignité. Les regards émerveillés des enfants et du public lorsque les animaux entrent en scène en disent bien plus que les divagations animalistes.
La chasse est elle aussi visée. Est-elle anachronique à vos yeux ?
La chasse fait partie des traditions. Je ne suis pas chasseur, pour tout vous dire, mais je côtoie de nombreux chasseurs amoureux de la nature. Ils participent à l’équilibre de la nature et des écosystèmes. Peut-être faudrait-il revoir ces lâchers de gibier le jour de la chasse ou la veille et diminuer les tableaux de chasse démesurés. Mais encore une fois, pourquoi tout interdire au nom de la condition animale ? J’ai du mal à comprendre. Pourquoi stigmatiser l’acte de chasse par l’image détournée du cerf épuisé en septembre en forêt de Compiègne lors d’une chasse à courre ?
Interdire les animaux dans les spectacles, c’est la fin d’un monde ?
La fin d’un monde peut-être pas mais la fin d’une époque sans doute! Je pense que ce sont les conditions et les règles de détention qui ne sont pas assez directives. Les animaux dans les spectacles engendrent une émotion positive chez les plus jeunes. Nous, gens de spectacle, avons en échange le devoir de les soigner, de les respecter et de les considérer pour tout le bien qu’ils nous procurent.
Le véganisme, conscient de son pouvoir, règne par la terreur et l’intimidation…
Il y a là un problème de respect des libertés individuelles, chacun est libre de consommer ou pas de la viande. Utiliser la terreur, l’intimidation ou la culpabilisation, c’est bafouer la démocratie. Les principes végans qui défendent le vivant m’étonnent beaucoup. Qu’en est-il des végétaux? Lorsqu’ils mangent de la salade, ils mangent aussi un organisme vivant… Ils sont vraiment plus drôles lorsqu’ils fument de l’herbe que lorsqu’ils en mangent !
Que pensez-vous de l’écologie punitive ?
Je vous avoue être étonné que le ministère de la Transition écologique soit en charge de la condition animale. Je ne suis pas certain que c’est là que cela doit être débattu. En revanche, ce ministère n’est pas là où on l’attend : où sont ses engagements en matière de pollution plastique ? de pollution aérienne ? de déforestation ? Je pense que ces inquiétudes sont à considérer avant le faux débat de la condition des animaux sauvages détenus dans les cirques itinérants. Nous sommes tous pour le bien-être animal. Combien d’animaux sauvages sont concernés par des conditions déplorables de détention en France ?
Faut-il se mobiliser face à la brutalité des décisions ?
Bien sûr ! Mais il est urgent surtout d’engager le dialogue avec les bonnes personnes et amener un peu de nuances aux prises de position rigides et unilatérales. Je suis bien plus inquiet par la condition humaine dans notre pays. On ne s’étonne plus de voir des hommes et des femmes sur les trottoirs, ni même des enfants et des mères faire la manche. Ça ne dérange personne et ne mobilise ni les médias ni les politiques avec autant de passion. ■