MON CHEVAL ME DIT
Cheval au grand coeur
La plupart des chevaux ont un coeur incroyable. Encore faut-il savoir le garder et même l’entretenir.
J’ai pleuré, oui j’ai pleuré quand je suis sortie de piste. De joie, de reconnaissance, d’émotion. Pour son dernier concours, ma jument Mistria, aujourd’hui à la retraite dans une grande prairie avec d’autres chevaux, m’a offert un sans-faute et même un classement ! Elle avait dixhuit ans. On a pris toutes les options et elle a littéralement volé au-dessus du dernier oxer. Mon coach m’a dit qu’elle n’avait jamais aussi bien sauté. Tout, elle m’a tout donné, comme si elle savait que l’instant était capital pour moi et pour elle.
Elle faisait ses adieux à cette piste qu’elle avait tant de fois foulée et où l’on avait vécu de grands moments mais aussi des instants plus difficiles. On y avait eu chaud, on avait pris des trombes d’eau, on avait frôlé l’exploit (à notre niveau), on s’était remis en question, on avait gagné, on avait perdu, on avait touché la dernière barre, attendu la deuxième manche, fait le tour d’honneur… Sa générosité aura été sans limite.
En avant !
Sacrée jument qui avait toujours envie d’aller de l’avant. C’était même un problème à nos débuts. Je ne savais pas la canaliser. Elle m’a obligée à me poser des questions, à revoir ma position, à oser la laisser passer… bref à devenir une vraie cavalière. J’ai compris que quand un cheval se donnait avec une telle générosité, je n’avais pas le droit de lui répondre par la contrainte. La forcer lui aurait enlevé cette fraîcheur qui faisait son charme. Je n’avais nullement envie d’une jument résignée. J’ai donc cherché à trouver des « biais » et je suis entrée en négociation avec elle. Pas de rênes allemandes ni de mors dur, un simple
filet mais accompagné d’un collier d’encolure qui m’a longtemps servi de frein. Et puis, des trottings, beaucoup de trottings en forêt pour me mettre avec elle. Des jeux à pied ou en liberté dans le rond de longe, de longues séances de « brouting » ou de grattage. À l’obstacle, j’ai appris à souffler à l’abord, à mollir dans les doigts, à la reprendre sans poser mes fesses dans la selle… Bref, j’ai entamé un long travail avec des hauts et des bas mais jamais Mistria ne m’a déçue. Jusqu’à son dernier concours, elle a gardé cet entrain de jeune cheval que j’adorais.
Papete, la jument de mon mari m’a permis de faire la transition. Pas plus généreuse que Papete ! Sur la piste, en forêt, au pré… elle veut tout le temps y aller. Pas besoin de mettre les jambes, elle répond à la pensée. Son seul défaut ? C’est ou plutôt c’était une sursauteuse. Au moindre bruit, en cas de mouvement bizarre… elle faisait demitour ! Nous l’avons « rééduquée » à pied, l’emmenant partout comme un petit chien. Elle sursaute encore mais ce n’est plus qu’un léger frémissement bien loin de ses demi-tours fulgurants. Côté CSO, elle n’a pas peur des obstacles, adore sauter mais, ne disposant pas de moyens énormes, elle croit compenser par la vitesse et trace comme un poney, pas forcément en équilibre. Mon coach m’a appris à la faire revenir uniquement avec ma position, à amplifier son galop mais sans ralentir. J’évite de la mettre en difficulté face à un oxer. Elle n’a pas la force de le couvrir sur une longue. Je m’oblige donc à bien attendre. De même, je l’engage à son niveau ou un peu en dessous, je ne vais pas chercher ses limites (ni les miennes !) Résultat : elle a aujourd’hui dix-sept ans et toujours autant d’entrain. Elle entre dans le van toute seule, suit toute la famille comme un petit chien et se tient toujours prête pour le barrage.
Ces deux expériences me confirment dans l’idée que la plupart des chevaux sont généreux. Hélas, beaucoup se blasent ou se dégoutent. Ils perdent la confiance et l’envie.
Comment cultiver sa générosité
Au préalable, il faut trouver un cheval dont les aptitudes correspondent à nos objectifs, ou, si ce n’est pas possible, baisser nos objectifs. Le cheval n’a pas demandé à être monté mais il s’y adapte incroyablement bien si on lui propose des exercices pour lesquels il a les aptitudes et la préparation nécessaire.
Ensuite, monter dans la joie. Donnons au cheval l’envie de bien faire
en le récompensant, en variant le travail, en gardant éveillée sa curiosité.
Quand vous l’emmenez en concours, faites-en sorte qu’il apprécie. Emmenez-le brouter ou découvrir les allées cavalières des alentours au petit trot. Faites-lui un pansage câlin, un massage récupération… Offrez-lui du foin, veillez à bien l’hydrater. Mettez-le en confiance avec une voix rassurante, des gestes lents. Établissez des petites routines. Les chevaux aiment bien avoir leurs repères. Par exemple, vous pouvez faire le pansage en concours comme à la maison, en respectant le même ordre. Pareil pour la détente. Encouragez-le. Le cheval est très sensible aux intonations de la voix et adore les compliments. Vous pouvez également développer son esprit d’initiative. Faites-lui résoudre des petits problèmes simples comme bien se placer pour ouvrir une porte, traverser une mare… Il va devenir plus sûr de lui, attentif, et… généreux. Trop de chevaux ont tellement l’habitude d’être contrôlés à 100% qu’ils n’osent plus prendre d’initiative et perdent ce brillant qui les rend si attractifs. Enfin, respectez sa personnalité. Chaque cheval a son caractère, son psychisme, ses goûts, ses envies. Certains sont taquins, entreprenants, joueurs. J’en connais qui font des farces comme marcher sur le tuyau de la douche en guettant la réaction de l’humain ou voler un mouchoir dans sa poche très délicatement. Laissez-les s’exprimer, dans le respect mutuel, bien évidemment. D’autres sont plus introvertis, plus timides, parfois peureux ou émotifs et ont besoin d’être rassurés. A vous de les libérer en les encourageant à affirmer leur personnalité.
Le cheval est très sensible aux intonations de la voix et adore les compliments.