Cheval Magazine

La maternité, un obstacle dans la carrière sportive ?

S’il y a bien un sujet qui concerne tout particuliè­rement les sportives évoluant à haut niveau, c’est la question de la grossesse. À quel point la maternité peut-elle influencer une carrière ?

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Depuis des années, les sportives annonçant leur grossesse sont victimes du préjugé suivant : enfants rime avec fin de carrière. Pourtant, nombreux sont les exemples de femmes ayant réussi à revenir au plus haut niveau. C’est le cas par exemple de la championne d’athlétisme Mélina-Robert Michon, vice-championne olympique en 2016 ou encore de la championne de tennis Serena Williams. Du côté des cavaliers, on peut citer une nouvelle fois notre cavalière de CSO Pénélope Leprévost ou encore Meredith Michaels-Beerbaum, toutes les deux mamans, mettant leur fille au monde sans arrêter leur carrière.

Une grossesse planifiée

Contrairem­ent à d’autres domaines profession­nels, une sportive de haut niveau a un calendrier d’échéances bien précis. La grossesse nécessite forcément un temps d’arrêt plus ou moins long au cours duquel il est possible de rater certaines grandes compétitio­ns. Un problème à nuancer pour Marina Caplain St-André, du fait de la carrière plutôt longue des cavaliers : « On peut effectivem­ent réfléchir quand on est sur des échéances type championna­ts ou jeux olympiques, mais en équitation, on a l’avantage d’avoir des carrières très longues. J’ai fait le championna­t d’Europe alors que j’étais enceinte de quatre mois et les championna­ts de France à cinq mois. Si la grossesse se passe bien, l’arrêt n’est pas si long. On peut pratiquer ce sport jusqu’à facilement 60 ans. Par rapport à des gymnastes ou des pratiquant­es d’athlétisme, on n’est moins pressées par le temps de carrière en équitation. La grossesse n’est pas une maladie, et heureuseme­nt ! »

Vient ensuite la question de la garde de l’enfant. Comme l’explique Félicie Bertrand, cavalière de CSO, un cava

lier est parti en moyenne du mercredi au dimanche, parfois à l’étranger. « Pour les femmes qui veulent avoir une vie de famille, ça peut être assez compliqué, il faut accepter peutêtre de voir un peu moins ses enfants, ou les emmener ». Bien sûr, les cavalières ne sont pas seules décisionna­ires de leur avenir. À moins d’être propriétai­re de leurs chevaux, il est important de s’entourer de propriétai­res de confiance, « qui vont accepter qu’il y ait une petite pause dans la carrière des chevaux ». Depuis 2010, les règles évoluent au niveau de la Fédération équestre internatio­nale, avec un système de conservati­on des points de la ranking : en CSO (depuis 2010) et en dressage (depuis 2019), les femmes ne peuvent pas perdre plus de 50 % de leurs points, si elles font la demande d’un congé maternité pouvant aller de six mois à un an. Pour le moment, la FEI n’a pas encore mis ces règles en applicatio­n en concours complet.

L’accès au haut niveau est régi par des règles complexes reposant principale­ment sur l’accès aux chevaux de qualité. Malheureus­ement, le système encore trop patriarcal de la société a tendance à dresser des barrières invisibles entre les hommes et les femmes, les propriétai­res jouant un rôle important dans l’attributio­n des rôles de cavaliers profession­nels. Le côté flou du statut n’aide pas les femmes, des études ayant montré que l’existence de diplômes et formations favorise l’accès des femmes à une profession. De même, il est encore impensable de nos jours que le congé maternité ne soit pas accessible aux cavalières de concours complet, même si la perte de 50 % des points reste un frein à la carrière. Néanmoins, tous les espoirs sont permis pour l’avenir : chez les jeunes, les cavalières sont nombreuses et talentueus­es, prêtes à tout donner pour réussir (comme le prouve, ce mois-ci dans notre numéro, le portrait de la jeune Marie-Charlotte Fuss, issue de la jeune génération du concours complet). Rendez-vous dans quelques années pour dresser le tableau de l’évolution de notre sport, toutes discipline­s confondues.

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 ??  ?? La dresseuse Jessica Michel-Botton qui est aussi maman d’un petit Tom.
La dresseuse Jessica Michel-Botton qui est aussi maman d’un petit Tom.
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Luciana Diniz.

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