Le terrassier de la City
« Il m’aura fallu plus d’un mois pour réaliser ce cliché. Ayant repéré les traces fraîches d’une famille de blaireaux évoluant dans ce cimetière anglais, l’idée m’est venue de photographier le tesson avec pour fond l’église. Le blaireau ayant une activité principalement nocturne et crépusculaire, il fallait que l’église soit illuminée de l’intérieur afin qu’on puisse la distinguer. Aussi ai-je dû convaincre le pasteur de bien vouloir allumer chaque soir l’aile gauche du bâtiment. J’ai ensuite relié mes appareils à un piège photographique de façon à prendre le mustélidé dans le champ du cimetière. Dernière petite ruse, j’ai étalé du beurre de cacahuètes en bordure de la tombe. Restait une ultime
contrainte, et non des moindres. Le quartier étant assez fréquenté, je devais installer mon matériel chaque nuit et venir le récupérer avant la pointe du jour, de peur de me le faire chaparder. » Image surprenante, fruit d’une talentueuse combinaison entre imagination et ténacité, là où nombre de photographes auraient jeté l’éponge. Ancien étudiant en histoire de l’art, puis guide naturaliste en France et en Afrique australe, Laurent Geslin s’installe à Londres en tant que photographe professionnel, avant d’élire résidence sur les bords du lac Léman. C’est lors de son
séjour londonien que lui vient l’idée de photographier la faune sauvage en milieu urbain. Arpentant les trottoirs asphaltés, les arrière-cours et les décharges, il traque les renards londoniens, les sangliers barcelonais ou encore les lapins parisiens. Autant de clichés qui ont donné lieu à un magnifique ouvrage intitulé Safari Urbain. Paru aux éditions Althus, et en vente sur le site de l’auteur (www.laurent-geslin.com), ce recueil nous invite à découvrir comment la faune sauvage a su coloniser la ville et s’adapter à la proximité de l’homme. Laurent Geslin, avec Gérard Hagenet